11 novembre 2022 à Évreux

11 novembre 2022 à Évreux

Comme l’an dernier, j’ai accompli le 11 novembre dernier le « pèlerinage » à Évreux pour fleurir la tombe de Roland Simion, mon oncle résistant qui a été l’un des derniers fusillés de la ville, le 23 août 1944, au moment de la débâcle allemande.

On se rappelle que l’an dernier, j’avais été choqué par la mascarade Covid qui avait conduit tous les officiels présent à se produire masqués par peur de la contagion. Cette mesure de prévention a dû être vachement efficace car, cette année, je n’ai pas noté d’absences notables chez les assistants – comme cela aurait dû être après une PANdémie (une maladie qui tue tout le monde ou à peu près) …

Cette année encore (le souvenir de la Libération est resté très présent à cet endroit), il y avait toute une brochette d’officiels et de figurants, avec drapeaux, fanfare, sonnerie aux morts, roulements de tambours… J’ai suffisamment le sens des formes pour être ému à la remémoration de ces événements dramatiques, et ne pas ricaner bêtement aux messages parfois maladroits des derniers témoins. Cette année, il y avait même une chorale d’enfants d’un collège du coin (très bien dirigés par leur professeur de musique) et, comme un con, je continuais d’être ému… Je maugréais bien un peu à l’idée que dans les anciens combattants encore vivants qui plastronnaient, il y avait des gens qui avaient fait la guerre d’Indochine, celle d’Algérie et autres régions du Maghreb ou d’Afrique, bref des guerres coloniales où les atrocités commises par les Français n’étaient pas sans rappeler celles commises par les Allemands… Mais bon, j’étais là pour honorer la mémoire de mon oncle, dont je n’ai aucun doute qu’il fut un homme honorable.

Mais là où mon émotion s’est muée en indignation, c’est lorsque les officiels présents ont cru bon d’honorer la mémoire des gens tombés lors des opérations militaires extérieures, incluant celles où la France se couvre de ridicule ou d’odieux grâce au génie géopolitique de ceux qui nous gouvernent et qui ne dissimulent pas leur fascination pour les uniformes. Roland, lui, n’avait pas d’uniforme, et je ne sais même pas s’il a été enterré dans un cercueil ou à même le sol ; mais c’était un héros, un vrai.

Ainsi va le devoir de mémoire. On pense à quelqu’un (ou à quelques-uns1), mais les vautours de la mémoire, eux, sont increvables – et toujours bien habillés.

Pour ne point parler des breloques dont ils se couvrent avec délectation.

Pour ne point parler des enfants dans l’esprit desquels ils sèment la confusion par l’amalgame : par exemple qu’être un homme ou une femme serait juste un choix personnel, réajustable à volonté.

 

  1. Il y a des familles qui ont été décimées lors des dernières guerres mondiales.