Le petit Ryan est mort…

Le petit Ryan est mort…

Pour ceux qui lisent autre chose que BFMTV ou Le Monde (avec une passion particulière pour « Les Décodeurs »), ce titre devrait en rappeler un autre, l’un des plus grands succès du dramaturge dont les mêmes (Pécresse, Hidalgo, etc.) clamaient voici quelques jours (à l’occasion de son quadri centenaire) qu’il était insurpassable et qu’il fallait le faire entrer au Panthéon. Quelques exemples ? « Pensées à Rayan, sa famille et le peuple marocain qui le pleure. Personne ne devrait avoir à vivre ce genre de drame » (Yannick Jadot, dont on remarque la hiérarchie axiologique : 1) le gamin, 2) la famille, 3) le peuple, qui doit compter 36 millions de personnes en plus du malheureux Ryan (dont énormément de misérable : mais comme on disait autrefois : « j’ai mes pauvres ». Yannick Jadot a ses misérables…)

Bien que le roi du Maroc ait cru bon lui aussi d’exprimer son émotion, on ne sache pas qu’il ait entrepris le moindre chantier pour sécuriser un environnement où ce genre d’accident semble chronique ; on ne sache pas non plus que ceux qui se targuent d’être personnellement au mieux avec lui (avocats, hommes politiques) aient entrepris quoi que ce soit pour redistribuer aux misérables une part de leur fortune acquise sur place.

Ils seraient pourtant sans risque de se trouver coincés dans un trou de 45 cm de diamètre : notre gouvernement nourrit bien ses ministres ou ses obligés. Il serait fastidieux de récapituler tous les messages de condoléances, émanant de gens qui ne brillent pas d’habitude par leur pouvoir ce compassion. Le Pape, Emmanuel Macron, le premier ministre israélien (en entre deux plasticage de maisons arabes). Des sportifs pas réputés pour leur charité ou leur douceur au tacle…

Il est plus instructif de saisir ce qui fait la communauté de tous ces messages idiots ou odieux. En fait, leur compassion est un artefact : ils s’emparent du malheur d’autrui pour en faire prétexte à communication, prétexte à faire parler d’eux. La charité, l’altruisme pour laisser libre cours aux clameurs hystérique du moi-je. La formule choc qui ne veut rien dire tellement elle est creuse. Un peu comme ces gens qui travaillent en freelance dans une chambre de bonne au dernier étage, mais qui ont un papier à en-tête International Office Demesdeux.

« Une équipe médicale de l’hôpital provincial de Chefchaouen, composée de médecins anesthésistes-réanimateurs, et d’infirmiers-réanimateurs se trouve sur place ».

On avait cru comprendre que grâce à l’intelligence des ingénieurs et à la compétence du personnel soignant, l’affaire était dans le sac : elle l’est d’une certaine façon, mais pas dans le bon…

Il y avait deux lectures possibles de ce malheureux fait divers : le risque d’accident, qui menace tout un chacun et le risque écologique – notre bonne vieille terre n’est pas uniformément habitable (même si l’hostilité de l’environnement peut être aggravée par l’homme).

Ce tragique de la vie s’est trouvé anéanti par les vieilles lunes de la toute-puissance humaine : la technologie d’une part (on allait creuser un tunnel de contournement), la médecine d’autre part (on allait maintenir en vie le gamin coûte que coûte).

C’est raté…