Aluminium et adjuvants – I. La mystification de la “myofasciite à macrophages”

RÉSUMÉ – Promue à la fin des années 1990 par le Groupe d’Études et de Recherche sur les Maladies Musculaires Acquises et Dysimmunitaires (GERMMAD), la maladie nommée « myofasciite à macrophages » (MFM) reposait initialement sur trois notions : i/ une lésion « nouvelle », identifiable par biopsie musculaire ; ii/ la présence « caractéristique » de cette lésion chez les malades concernés ; iii/ une symptomatologie présentée comme « stéréotypée ». À l’origine de la MFM, les auteurs du GERMMAD incriminaient l’aluminium utilisé comme adjuvant dans la plupart des vaccins. Après vérification dûment référencée, il s’avère cependant que : a/ la lésion histologique censément nouvelle avait été parfaitement décrite bien avant ; ii/ chez un pourcentage de malades pouvant avoisiner 50%, la lésion censément caractéristique est introuvable, alors que personne n’a eu l’idée de rechercher à quelle fréquence on la retrouvait chez des sujets parfaitement normaux ; iii/ de l’aveu ultérieur des auteurs, la symptomatologie des malades est « peu caractéristique », composée de symptômes effectivement très banals (douleurs musculaires, fatigue…). Faute d’une caractérisation clinique au moins minimum, on se voit donc réduit à une tautologie parfaitement circulaire : la biopsie musculaire caractérise une maladie (la MFM) exclusivement définie par une biopsie musculaire… À l’aide d’exemples à finalité didactique, on procède ensuite à une analyse critique des erreurs méthodologiques dirimantes qui décrédibilisent totalement le travail « de recherche » mené par le GERMMAD sur le sujet. Seul résultat indubitable – et indubitablement dû au GERMMAD : alors que chez les sujets initialement présentés comme souffrant d’une MFM, on retrouvait spécifiquement une exposition à la vaccination contre l’hépatite B dans un pourcentage d’au moins 90%, toute référence à cette vaccination a désormais disparu au profit de l’adjuvant aluminique auquel, cette fois, la totalité de la population a été exposée… Plus inquiétant encore : grâce à la médiatisation des hypothèses pourtant irrecevables échafaudées par le GERMMAD, la vague promesse d’une élimination de l’aluminium justifie désormais des propositions de plus en plus pressantes visant l’élargissement des obligations vaccinales dans notre pays.

Disons-le d’emblée: n’étant ni chimiste, ni toxicologue, ni pharmacologue – et ne disposant pas, d’autre part, de cette omniscience dont rayonnent les petits maîtres d’Internet (fussent-ils dépourvus de la moindre formation scientifique documentable1) -, je n’ai AUCUNE idée quant à la toxicité de l’aluminium en général, ni des adjuvants vaccinaux en particulier.

Mais je sais en revanche, et de science sûre, que le concept de “myofasciite à macrophages” (qui a tellement contribué à populariser la toxicité présumée de l’aluminium et des adjuvants) est une mystification, grossière de surcroît.

C’est ce que je me propose de montrer dans les lignes qui suivent. La problématique médico-scientifique en question exigeant des développements relativement longs, on me pardonnera d’y user, pour gagner du temps, de quelques termes spécialisés: pour faciliter la lecture, ces termes* seront suivis d’une astérisque, renvoyant à un glossaire en fin d’article.

Un consensus de faux-culs

“Dis-moi qui tu ne gênes pas” disais-je en conclusion d’un précédent article consacré aux fausses dénonciations. À l’aune de ce critère, la toxicité de l’aluminium dans les vaccins n’a pas l’air de gêner grand monde, et le consensus de souci convenu qu’elle génère chez les pires manipulateurs devrait quand même alerter jusqu’aux plus naïfs:

  • ainsi quand, tout en accumulant gadin sur gadin relativement à leurs liens indécents avec les lobbies pharmaceutiques, des parlementaires (au premier rang desquels l’inénarrable Gérard Bapt) soldent l’immense scandale du H1N1 par des recommandations visant à alourdir les obligations vaccinales déjà exceptionnelles qui prévalent en France, avec pour seule réserve – merci Gérard! – la mise à la disposition du public d’une formulation “sans aluminium”;
  • ainsi quand les experts de l’ANSM – qui n’ont jamais bronché devant les pires falsifications de leur administration sanitaire2 – opinent d’un chef tellement compassé à l’idée que l’hypothèque aluminique appellerait des études plus poussées3;
  • ainsi quand, sous couvert d’un rapport sollicité par le Sénat, la Cour des comptes (qui, sous une présidence “socialiste” dont l’extrémisme libéral ferait rougir n’importe quel représentant de la droite dure, fonctionne actuellement comme le lanceur de drones le plus ravageur du néocapitalisme triomphant) s’autorise à des recommandations atterrantes relativement à la politique vaccinale, là encore sous la seule réserve que toute l’attention idoine soit consacrée au problème apparemment insupportable de l’aluminium utilisé comme adjuvant…

Alors donc que tous ces gens-là s’obstinent à ignorer, ou – pis encore – à nier, voire à falsifier les principaux problèmes sanitaires de l’époque (à commencer par celui des millions de personnes qui, dans notre pays même, ne mangent tout simplement pas à leur faim4), comment comprendre cette unanimité de souci relativement à une question qui, si j’en crois le décompte opéré en juin 2011 par la principale association concernée, aurait suscité à l’époque le total ridiculement bas de 21 publications internationales (correspondant, pour une entité apparue en 1993, à environ une publication par an) ?… À l’aune de cet indicateur complémentaire, la myofasciite à macrophages fait largement le poids avec d’autres problématiques d’intérêt général, telles que la place du chandelier à sept branches dans la liturgie byzantine – à ceci près que, par rapport à la première, la seconde n’a encore jamais inspiré la moindre grève de la faim, du moins à ma connaissance5.

Une “expertise” multibancale

J’ai sous les yeux une correspondance récente (11/02/13) d’un des principaux découvreurs de la “myofasciite à macrophages”, qui répond aux critiques pourtant justifiées qu’un avocat avait émises à l’endroit d’une telle entité. Opposant non sans mépris “la méthode scientifique” à la “stratégie judiciaire”, l’intéressé détaille comme suit ladite méthode : “étudier des cas de figure simples pour y comprendre quelque chose, puis élargir progressivement le champ, en procédant pas à pas. Ce n’est pas de l’aveuglement, c’est la seule approche possible en recherche expérimentale” (c’est moi qui souligne).

Les visiteurs de ce site connaissent la méfiance spontanée qu’on y entretient à l’endroit des “experts” qui évacuent toute critique (fût-ce de leurs conflits d’intérêts pourtant les plus patents) en s’abritant derrière LA Science6 , dont la seule évocation leur suffit pour disqualifier leur interlocuteur7. Prenons-nous au jeu et commençons par auditer le discours de nos découvreurs à l’aune de leur idéal affiché – la Science -, en adoptant la démarche consistant à passer rapidement en revue celui qu’ils ont tenu aux différentes phases du processus normalement attendu dans la découverte et l’authentification d’une nouvelle maladie, à savoir: 1/ premières observations; 2/ caractérisation clinique; 3/ caractérisation paraclinique (examens complémentaires); 4/ confirmation épidémiologique.

Premières observations

En 1993 (retenez bien la date), chez une infirmière (retenez bien la profession) suivie pour une myopathie* s’exprimant cliniquement par des douleurs musculaires et articulaires associée à une faiblesse musculaire, une biopsie réalisée au niveau du deltoïde montre “un tableau histologique* jusqu’à présent jamais décrit dans la littérature”, caractérisé “par un riche infiltrat centripète multifocal épimysial, périmysial et endomysial, de cellules cohésives PAS+ de la lignée monocyte/macrophage (…) à large cytoplasme finement granuleux”8: que le lecteur qui n’a rien compris se rassure, nous verrons bientôt que même nos audacieux découvreurs s’emmêlent les pinceaux à ce sujet.

Sous la houlette du Groupe d’Études et de Recherche sur les Maladies Musculaires Acquises et Dysimmunitaires (GERMMAD), il devient possible cinq ans après – toujours sous l’intitulé “Apparition d’une nouvelle entité”, mais en anglais dans le texte (An emerging entity) – de publier une première série de 14 cas français9.

Ayant ensuite repéré, chez les patients atteints, des inclusions cytoplasmiques* qui devaient s’avérer, après analyse spectrométrique, être des particules d’hydroxyde d’aluminium10, les découvreurs de la “myofasciite” s’avisent alors que ledit aluminium doit provenir de vaccins utilisant cette substance comme adjuvant.

Lorsqu’une “nouvelle” entité pathologique apparaît aussi brutalement dans l’environnement sanitaire, c’est un réflexe de base que de s’interroger sur les circonstances également “nouvelles” susceptibles de rendre compte d’une telle irruption. Or l’aluminium dans les vaccins, c’est aussi vieux ou presque que Mathusalem: les responsables du GERMMAD admettent eux-mêmes qu’on en trouvait déjà en… 1926: la nouveauté qui rend compte de cette toxicité inédite avec un composé aussi ancien, ce serait – d’après eux – “les modifications du mode de vaccination (passage de la voie sous-cutanée à la voix deltoïdienne intramusculaire)” – qu’ils datent des années 1993-9411.

Le seul problème, c’est qu’il suffit de consulter les diverses éditions du Vidal pour constater que les recommandations d’injections vaccinales intramusculaires sont également très antérieures aux années 1993-94… Ainsi, c’est dès 1981 qu’on y trouve mention de la voie intramusculaire pour le vaccin Tétavax, qui utilisait déjà l’hydroxyde d’aluminium. D’où la question, inchangée: pourquoi en 1993, et pas avant? Pour des gens qui prétendent s’abriter derrière “la” Science, on admettra qu’une erreur de référencement aussi grossière sur un point aussi fondamental, ça fait un peu désordre.

Certes et depuis dix ans, les mêmes ont enfin trouvé le super moyen pour réfuter l’objection découlant naturellement de leur propre interprétation, à savoir qu’en fait, les myofasciites auraient été très antérieures, mais que personne avant eux n’avait encore été capable de les reconnaître. Cela n’enlève rien à l’inadéquation de l’argumentation initiale12, en y ajoutant simplement un apparentement terrible: car on retrouve là, typiquement, la stratégie du disease mongering (la fabrique des maladies) qui permet aux lobbies pharmaceutiques de justifier une médicalisation nouvelle pour contrer une terrible menace de santé publique qu’avant eux, personne n’avait été capable d’apercevoir… On a le droit de ricaner.

Indicateur d’un certain manque de crédibilité scientifique en général, cette désinvolture à l’endroit du référencement s’aggrave, en l’espèce, de sa récurrence et du fait qu’à chaque fois, elle porte sur des points cruciaux : lorsque l’on clame à qui veut l’entendre que l’on a découvert un phénomène “nouveau”, la moindre des choses est quand même de vérifier qu’on est effectivement dans la nouveauté. Or, il va ainsi peu à peu apparaître que “le tableau histologique* jusqu’à présent jamais décrit dans la littérature”13 ressemble comme deux gouttes d’eau à des images connues de longue date après injection d’aluminium, par exemple dans le cadre d’une désensibilisation allergique. D’où, au moins, trois remarques additionnelles relatives aux méthodes de travail du GERMMAD.

  1. Pour quiconque a un minimum d’expérience en recherche clinique, c’est une imprudence de gamins de clamer que tel ou tel phénomène n’aurait encore “jamais” été décrit dans la littérature, relativement à la formulation plus rigoureuse (et modeste) qui consisterait simplement à affirmer qu’après une recherche bibliographique (dont les modalités devraient alors être dûment détaillées – afin de permettre à n’importe quel collègue de la refaire), il n’a pas été possible d’identifier une description du phénomène en question. Ça évite le ridicule de découvrir a posteriori qu’on est passé à côté quand il a été effectivement décrit mais sous des mots-clés insoupçonnés (“nouveauté” oblige…), ou dans des publications non répertoriées dans les bases consultées (les grandes revues n’aiment pas beaucoup la vraie “nouveauté”), ou encore dans des langues (chinois, japonais, arabe, hébreux, néerlandais…) qui ne font pas partie du bagage linguistique naturel du médecin français moyen, si éminent “scientifique” soit-il14: bref, le B A BA de la recherche bibliographique tel qu’on s’attache à l’enseigner le plus précocement possible aux étudiants…
  2. Recevant à sa demande l’un des fondateurs du GERMMAD, je lui soumis, après en avoir dissimulé la référence, la Figure 2 d’un article alors antérieur de plus de 20 ans15, montrant une photographie des désordres histologiques provoqués par l’injection de particules d’aluminium et correspondant à l’entité classique d’un “granulome aluminique”, rapporté depuis longtemps dans la littérature comme complication locale sans que soit jamais évoqué le moindre symptôme général associé. Mon interlocuteur affirma aussitôt que cette image correspondait tout à fait aux observations du GERMMAD, avant de s’embrouiller au motif qu’il n’était pas lui-même anatomo-pathologiste* quand je portai à sa connaissance l’ancienneté de ma source. On me permettra de penser que quand on ne dispose pas de la compétence anatomo-pathologique idoine, il faut une certaine légèreté pour s’engager à fond dans la promotion d’une “nouvelle entité pathologique” qui repose exclusivement sur une image histologique (“le diagnostic ne peut être établi que par la biopsie musculaire”16).
  3. Prenant acte, non sans un certain retard, de la préexistence dans la littérature de lésions très ressemblantes à la leur (dans des observations publiées plus de 25 ans auparavant), les membres du GERMMAD – non contents d’ignorer qu’un tel constat remettait sérieusement en cause leur prétention d’avoir identifié “un tableau histologique jusqu’à présent jamais décrit dans la littérature” (et, par conséquent, leur conclusion un peu précipitée sur l’émergence d’une “nouvelle entité pathologique”) – vont au contraire en tirer que ces résultats anciens “établissent fermement que les vaccins contenant de l’aluminium représentent la cause directe de la lésion de myofasciite”17. “De la lésion”, certes, mais de la maladie supposée liée à cette lésion, quand ces publications antérieures censément confirmatives étaient strictement muettes sur l’association de cette même lésion à des symptômes généraux? Une fois encore, on peut rêver plus rigoureux comme raisonnement – et un peu plus autocritique au titre de l’éthique scientifique opposée à la “stratégie judiciaire”18

Caractérisation clinique

Les médecins ne sont peut-être pas tous des grands “scientifiques”, mais la nosographie* étant faite pour les malades bien davantage que l’inverse, un minimum de bon sens les a généralement conduits à définir le plus précisément possible19 les manifestations cliniques des maladies qu’ils prétendaient découvrir. Si l’on admet, par conséquent, qu’une “nouvelle” maladie se repère d’abord à la nouveauté de son tableau clinique (avant de susciter les efforts idoines pour tenter de la caractériser par tous les examens complémentaires appropriés), force est de constater que, telles qu’établies par le GERMMAD, les premières descriptions de la myofasciite frappent par l’indigence de leur sémiologie* (les auteurs admettant eux-mêmes que les manifestations cliniques sont “peu spécifiques” – ce qui est le moins que l’on puisse dire sur la base de leurs observations).

Au rythme des publications pourtant faites sur une période de temps rapprochée et sur la même série incrémentée, le principal symptôme – les douleurs musculaires -, déjà fort peu spécifique (surtout chez des patients adressés avec un diagnostic de myopathie…), aurait été observé chez 86 à 95% des cas, nonobstant une chute brutale à 33% dans une série20, ce qui soulève quand même d’intéressantes questions quant à la caractérisation des patients évalués par les médecins du GERMMAD; les arthralgies*, elles, sont supposées concerner de 0% 21à 70% des cas, tandis que l’asthénie concernerait de 36% à 95% des cas ! Sachant que certains des patients étaient également atteints de sclérose en plaques22 (ou d’autres pathologies associées pas forcément moins lourdes: thyroïdite de Hashimoto, polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux…), on peut quand même s’interroger sur la valeur discriminante d’un symptôme tel que l’asthénie chez les sujets concernés. Semblablement, on reste songeur quand, dans un effort de clarification dynamique, des auteurs du GERMMAD croient judicieux de préciser que les douleurs musculaires “peuvent survenir après un exercice d’intensité inhabituelle”23 – caractérisation sémiologique dont la subtilité n’échappe à personne et qui fait de tout un chacun un candidat à la “myofasciite à macrophages”24. Bref et pour résumer: y z’avaient des gouzis dans les muscles, et de la sclérose en plaques ou des trucs emmerdants comme ça… Nous sommes là dans la grande tradition clinique française ou je ne m’y connais pas25.

A l’inverse, quelques minutes d’entretien suffisent au moins clinicien (dont l’auteur de ces lignes) pour reconnaître les troubles neurocognitifs majeurs (mémoire, concentration) présentés par les patients réputés souffrir d’une “myofasciite”: et on notera que les brillants internistes du GERMMAD admettent aujourd’hui qu’ils sont “constants” chez ces patients26. N’empêche qu’il leur aura fallu près de dix ans pour s’aviser de symptômes aussi voyants27.

Examens complémentaires

Lorsqu’on s’est attaché à caractériser le plus précisément possible les symptômes d’une nouvelle maladie, on cherche ensuite s’il est possible de corréler ce tableau clinique avec des examens complémentaires (prélèvements divers, examens radiologiques ou électrophysiologiques, tests…) dont les anomalies se retrouvent régulièrement – sinon systématiquement – chez les sujets atteints et dont l’interprétation, grâce à l’établissement de normes, offre généralement un gain d’objectivité sur le simple examen clinique : on n’a pas besoin d’expérience pour constater si la valeur d’un examen tombe à l’intérieur ou à l’extérieur des normes. En l’espèce, aucun doute: de l’aveu même des découvreurs de la myofasciite, l’examen de référence serait la biopsie musculaire.

Il s’avère justement que cette biopsie réalise un sommet d’absurdité dans une démarche nosographique dont on a commencé de montrer que, depuis le début, elle avait trébuché à chaque pas.

  1. Les auteurs du GERMMAD eux-mêmes admettent que la lésion supposée “caractéristique” se situe au point exact de l’injection vaccinale supposée causale. Or, il suffit là encore de consulter le Vidal pour constater que les recommandations d’injection intramusculaire pour les vaccins incriminés concernent soit le deltoïde (membre supérieur), soit la cuisse, et qu’il n’est jamais spécifié si l’injection doit se faire à droite ou à gauche: de telle sorte que la décision pour opérer un geste diagnostic quand même assez agressif28 doit se prendre au hasard entre quatre sites possibles29. En d’autres termes et indépendamment de sa valeur diagnostique propre, le geste biopsique a juste 3 chances sur quatre (75%) de passer à côté de la lésion si elle existe… Ça commence bien en matière de “seule approche possible”…
  2. Encore plus fort: les injections vaccinales n’étant quand même pas des balles à fragmentation supposées dilacérer les muscles, même si l’on a visé du bon côté, il faut tomber juste à l’endroit de l’injection (dont les auteurs du GERMMAD soutiennent aujourd’hui qu’elle peut remonter plus de dix ans en arrière): il suffit de passer à 20 millimètres du point d’injection pour la louper30… Ainsi, à l’incertitude anamnestique* qui peut à elle seule rendre compte de 75% de faux négatifs, s’ajoute – même chez le patient qui se souviendrait parfaitement de l’endroit et du côté où il a été vacciné – un risque de rater la cible, difficilement quantifiable, mais dont chacun voit bien qu’il ne peut être négligeable… A ce stade, ce n’est plus du diagnostic: c’est de la chirurgie microscopique – sauf que même avec un fort grossissement, on ne sait jamais exactement où il faut opérer… En médecine, il y a comme ça plein de blagues sur des chirurgiens bigleux qui font des trucs terribles, mais juste au mauvais endroit31
  3. Quand bien même la lésion histologique identifiée à tort par le GERMMAD comme encore “jamais” observée serait caractéristique de quoi que ce soit, les deux alinéas précédents devraient suffire à démontrer qu’une biopsie musculaire avec un potentiel aussi exorbitant de faux négatifs ne saurait, en aucun cas, être utilisée comme examen diagnostic. Mais le bouquet du pompon – à moins que ce ne soit l’inverse – tient à ce que, en l’espèce, les promoteurs de cet examen mis au point chez des malades n’ont jamais éprouvé le besoin d’aller vérifier de façon tant soit peu systématique ses résultats chez les sujets normaux: il faut quand même n’avoir peur de rien pour qualifier de “pathologique” (Pathologique: “qui s’écarte du type normal d’un organe ou d’une fonction”, selon le Grand Robert.) un examen dont on ne connaît absolument pas “le type normal”! En prétendant justifier par un argument éthique de n’avoir pas procédé au même test chez les sujets normaux, les auteurs du GERMMAD font preuve d’une désinvolture philosophique qui vaut bien leur débraillé méthodologique: car s’il n’est effectivement guère éthique d’imposer à des sujets normaux un test aussi mutilant qu’une biopsie musculaire32, on peine à comprendre en quoi elle le serait moins chez des sujets malades, alors que faute de valeurs normales, elle ne permet en rien de caractériser quoi que ce soit et que, de toute façon et jusqu’à nouvel ordre, elle ne débouche sur aucune stratégie de traitement33.
  4. On ne manque pas d’être intrigué, également, par la bizarre revendication des découvreurs du concept – exprimée dès leurs premières publications et reformulée ensuite jusqu’à l’obsession – d’obtenir une sorte de monopole sur l’évaluation de tous les cas de myofasciite: “il est indispensable que tout nouveau cas soit signalé et expertisé par le GERMMAD”34 (c’est moi qui souligne). Dans la mesure où le geste de biopsie musculaire ne semble recéler aucune subtilité technique propre à l’espèce, où des membres de l’équipe parmi les plus éminents finissent par avouer que l’histologie n’est pas leur tasse de thé (cf. ci-dessus) et où rien, eu égard à leur cécité durable devant des symptômes aussi massifs que les troubles neurocognitifs, ne les autorise à se prévaloir d’une expertise irremplaçable à l’égard des patients atteints, on ne voit pas en quoi des évaluations opérées par d’autres équipes pourraient appauvrir la recherche sur le sujet: à l’inverse, force est de constater que quand un concept nosographique* peine à objectiver ses méthodes d’évaluation pour que d’autres puissent se les approprier (ce qui le principe même de la méthode), on est très loin de cette “Science” derrière laquelle, pourtant, les membres du GERMMAD s’abritent compulsivement pour décrédibiliser les critiques pourtant graves et multiples que le concept de “myofasciite à macrophages” ne peut que susciter chez n’importe quelle personne dotée d’un minimum de culture médico-scientifique.

Ainsi, alors que le GERMMAD n’a cessé de clamer avec une fierté aussi manifeste qu’incongrue que “LA définition de cette nouvelle maladie est histologique”, il vient d’être documenté que la promotion de la biopsie musculaire comme critère diagnostique déterminant d’une “nouvelle entité pathologique” avait reposé sur – au moins – deux bévues:

  • une insuffisance de référencement conduisant les découvreurs de la maladie à traiter comme “jamais décrit” un tableau histologique pourtant répertorié depuis longtemps;
  • une aberration nosographique consistant à présenter comme pathognomonique* d’une “pathologie” un examen complémentaire qu’ils n’ont jamais pris la peine d’évaluer chez des sujets normaux, ALORS QUE, de plus :
    • les références bibliographique regrettablement ignorées par le GERMMAD permettent de reconstituer qu’il existe des tableaux histologiques étonnamment proches chez des sujets ne présentant aucun symptôme de maladie générale: si cette lésion peut ainsi se retrouver associée à rien de cliniquement significatif, de quoi est-elle “pathognomonique”?
    • aussi regrettablement ignorée par le GERMMAD, la notice Vidal susmentionnée de Tétavax précisait, dès 1981, que “du fait de l’adsorbant [i.e. l’aluminium], il peut se former, au point d’inoculation, une réaction locale avec un petit nodule régressif”: je voudrais bien connaître l’histologie de ce petit nodule observé – et depuis si longtemps – chez des sujets parfaitement normaux par ailleurs35

Si les objections qu’on peut ainsi émettre à l’encontre de l’examen sur lequel repose toute la construction de la “myofasciite” sont déjà d’une portée gravissime pour la crédibilité “scientifique” du concept, il existe, en sus, bien d’autres indicateurs de la légèreté du GERMMAD. On a relevé plus haut qu’il leur avait fallu près de dix ans pour prendre la mesure des troubles cognitifs qui sont pourtant au premier plan du tableau clinique; mais les examens enfin mis en oeuvre par l’équipe pour objectiver lesdits troubles s’avèreront non moins critiquables que la biopsie. Comme me l’expliquait une collègue psychologue clinicienne parfaitement au fait de ces problématiques, les évaluations neuro-psychologiques finalement mises en œuvre à l’instigation du GERMMAD, notamment celles (telles que le MMS) réalisées en Service de gériatrie, sont trop peu spécifiques puisque en principe destinées à une population de sujets âgés chez qui l’on suspecte notamment une maladie d’Alzheimer : ces évaluations, par conséquent, sont susceptibles d’être d’une sensibilité tout à fait insuffisante pour mettre en évidence les troubles (pourtant profonds) de sujets plus jeunes ayant une efficience cognitive antérieure présumée normale ou supranormale, comme attendu chez des personnes qui avaient occupé jusqu’à récemment des fonctions d’encadrement ou de travailleur indépendant.

Déjà majeurs, les doutes que l’on peut donc entretenir quant à la pertinence médico-scientifique des évaluations neurocognitives ainsi mises en oeuvre se renforcent d’un soupçon concernant le gériatre36 apparemment chargé desdites évaluations, puisque ce dernier s’est trouvé mis en examen pour complicité d’exercice illégal de la médecine. Certes et indépendamment du fait que ce même gériatre a vu ensuite sa “probité” mise en cause dans l’affaire Bettencourt, la présomption d’innocence s’impose sans aucun doute37: mais on admettra que dans un contexte où les découvreurs de la myofasciite n’ont rien d’autre que “la” Science pour balayer la moindre critique motivée, tout ça la fout mal – comme on dit vulgairement38.

Confirmation épidémiologique

Tout à son entreprise de promotion du concept pourtant très flou de “myofasciite”, le GERMMAD ne va pas manquer – dès ses premières publications – d’invoquer avec ostentation les évaluations “épidémiologiques” en cours, supposées confirmer l’irruption dans le paysage sanitaire de cette “nouvelle entité”. Nous aurons l’occasion de revenir longuement sur la principale d’entre elles, mais dans l’esprit du présent chapitre, nous nous contenterons pour l’heure d’examiner quelques contributions du GERMMAD qui autorisent à mettre sérieusement en doute la crédibilité cette fois épidémiologique de ses membres.

Une préoccupante ignorance relativement aux bases pourtant élémentaires des statistiques descriptives ressort par exemple de l’assertion que sur un groupe de patients, l’âge “moyen” serait “43 à 15 ans”, comparé à l’âge “moyen” du groupe témoin, évalué, lui, de “43 à 8 ans”39: à l’évidence, les auteurs confondent là “les extrêmes” (la plus petite et la plus grande valeur d’une série numérique) et la moyenne, qui n’a rien à voir. Même questionnement quant à la culture statistique des auteurs devant le tableau 2 d’un article déjà cité40, où – contrairement aux règles élémentaires en pareille espèce – il est strictement impossible de reconstituer si l’effectif de la série décrite est de 30 ou de 75 patients.

La crédibilité épidémiologique des chercheurs impliqués ressort également du Rapport d’investigation exploratoire réalisé en mars 2001 conjointement par le GERMMAD et l’InVS: dans la version dactylographiée initiale, le pourcentage de patients réputés avoir des antécédents de vaccin contre l’hépatite B est de 88,7%, tandis que dans la version officielle imprimée et portant sur le même échantillon de patients (n = 93), ce pourcentage n’est plus que de 67,9% sans qu’apparemment aucun des maniaques de la rigueur scientifique en charge de cette étude ne se soit ému d’une telle différence 41.

Mais, pour préoccupantes qu’elles soient déjà, ces insuffisances ne sont que broutilles par comparaison au festival d’âneries auxquelles va donner lieu la diffusion du compte rendu officiel de la grande étude “épidémiologique” menée conjointement par le GERMMAD et les autorités sanitaires françaises. Il s’avère (nous y reviendrons) que cette étude va déboucher sur des résultats extrêmement défavorables aux intérêts du GERMMAD puisqu’elle conclut, en gros, que la “myofasciite” est un concept flou, trop mal caractérisé pour qu’on y consacre une énergie significative42. Manifestement dépités quant aux perspectives de recherche qu’ils s’imaginaient tout naturellement se voir confier – évidemment assorties du financement idoine… -, les responsables du GERMMAD tentent le tout pour le tout et, avec l’aide d’une association de patients, organisent une “conférence de presse” dans laquelle ils se lancent dans une critique tous azimuts de l’étude à la conception et à la réalisation de laquelle ils ont pourtant participé depuis le tout début, opérant de la sorte une contre-expertise de celle validée par les autorités sanitaires: et ce n’est pas triste…

On y entend ainsi l’un des fondateurs du GERMMAD vanter l’étude à laquelle le groupe a participé au motif que celle-ci aurait été conçue « à l’américaine », puisqu’elle prévoyait… « des critères d’inclusion et d’exclusion » !… Puis, à l’objection parfaitement justifiée d’une participante concernant ce point fondamental que les biopsies deltoïdiennes n’ont pas été évaluées chez les sujets normaux (de telle sorte qu’on n’a aucun point de référence), on entend un autre responsable du GERMMAD rétorquer que c’était là, précisément, « le but de l’étude »: or, il suffit d’en lire le rapport pour constater que ladite étude consistait à comparer deux groupes de malades, de telle sorte que l’on peine à imaginer par quel sortilège les valeurs de sujets normaux pourraient s’extrapoler des observations opérées chez des malades…

Au total

Commentant pour la presse grand public (Libération, 08/05/2004) la fin de non-recevoir de l’AFSSAPS à un nouveau programme de recherches qui aurait fait suite aux résultats négatifs – d’ailleurs parfaitement prévisibles (cf. plus bas) – d’une étude à laquelle les membres du GERMMAD avaient pourtant été associés depuis le tout début, l’un d’entre eux déclare avec une mauvaise humeur non dissimulée: “les études nécessaires, on sait les faire, on peut avoir les résultats en un an, c’est un problème de budget”. Pour étonnant qu’il puisse paraître sur la base des éléments disponibles, cet aplomb expéditif (laissez-nous faire et aboulez l’oseille) trouve son écho dans le soutien sans faille des associations depuis le tout début, et dont la persistance – voire l’exacerbation – est attestée par une lettre ouverte du 17/10/12, adressée au ministre de la santé, pour protester contre l’idée que le problème soit repris à zéro grâce à de nouvelles équipes de chercheurs: “Une telle décision serait irrationnelle. Elle écarterait tout simplement une équipe compétente, ayant acquis une solide expérience dans un domaine extrêmement pointu, et immédiatement opérationnelle.” (c’est moi qui souligne).

Alors même que nous ne sommes pas encore entrés dans l’analyse médico-scientifique du problème posé, le simple inventaire qui précède – et qui ne prétend nullement à l’exhaustivité – devrait pourtant suffire à ramollir l’époustouflant aplomb du GERMMAD et à refroidir l’enthousiasme béat des associations relativement au monopole de la rationalité qu’elles attribuent à ce groupe. En s’en tenant au seul examen des faits et indépendamment de tout procès d’intention, on ne voit vraiment aucune raison de signer un blanc-seing assorti d’un chèque (d’argent public ou privé) à des gens qui peinent à préciser si une symptomatologie est “stéréotypée” ou “peu caractéristique”, qui estiment que la reconnaissance déjà ancienne de lésions histologiques d’abord promues comme encore jamais vues “confirme” leurs allégations antérieures (alors qu’une telle reconnaissance rétrospective tendrait plutôt à les infirmer), qui ont besoin de quelque dix ans pour reconnaître une symptomatologie cognitive sautant pourtant aux yeux du moins clinicien, qui ne connaissent pas la terminologie basique des statistiques élémentaires, qui manquent d’une élémentaire culture scientifique pour l’appréciation des précisions inhérentes aux quantifications expérimentales43 et qui évaluent la qualité d’une étude épidémiologique en fonction d’une méthodologie tenant plus d’un imaginaire parahollywoodien (“à l’américaine”) qu’à une compétence d’espèce même subliminale. Nulle raison, non plus, de promouvoir comme “centre de référence” des Services où l’on peine si manifestement à inventorier celles de la bibliographie et où, soit dit sans malveillance aucune44, on n’a pas toujours la main heureuse dans le choix de ses collaborateurs.

Analyse critique du concept de myofasciite à macrophages

À partir de 1993, on l’a dit, apparaît dans le paysage médical français une symptomatologie assez bizarre, sur la description précise de laquelle je reviendrai plus bas mais que l’on peut caractériser pour l’instant comme un tableau de grande fatigue chronique associée à des douleurs musculaires et articulaires. Sur cette caractérisation sémiologique pour l’instant assez vague, le fait saillant – qui va malheureusement conduire à une surévaluation hystérique de la biopsie deltoïdienne – est purement négatif, mais d’une immense pertinence épidémiologique: on a beau “couper les patients en rondelles” – c’est-à-dire multiplier les examens complémentaires jusqu’à l’insensé encore autorisé à cette époque par l’inépuisable générosité de notre assurance maladie (surtout à l’endroit de l’inventivité diagnostique de nos médecins hospitaliers) – on ne trouve RIEN, aucune cause en particulier.

Comment la sémiologie* peut violenter l’étiologie*

On l’a vu au chapitre précédent: les créateurs du concept de myofasciite à macrophages admettent qu’ils peinent à décrire les signes cliniques45 de la maladie dont ils prétendent pourtant avoir formellement identifié et la caractérisation (biopsie deltoïdienne), et l’étiologie (vaccins aluminiques). Un exemple imagé va nous aider à comprendre qu’on se brûle facilement les doigts à un tel jeu: même lorsqu’une cause est parfaitement identifiable, le flou dans la description clinique (sémiologie*) contribue forcément à brouiller cette cause (étiologie*).

Imaginons que dans une chaîne d’emballage du fabricant Lustucru, un incident technique cause une contamination des pâtes par le pigment bleu qui colore les célèbres boîtes et qu’en conséquence, les consommateurs des pâtes ainsi contaminées se retrouvent avec des urines colorées en bleu. Compte tenu du caractère assez atypique de ce désordre, on peut imaginer qu’une enquête épidémiologiquement bien menée (par exemple: sous la houlette de la CNAM – avec une supervision parlementaire emmenée par G. Bapt…) parvienne facilement à identifier la contamination alimentaire comme la cause du problème.

Mais imaginons maintenant qu’avec cette nonchalance qui a présidé à la description clinique des cas de myofasciites, l’alerte soit lancée non pas autour d’une urine bleue (éventuellement caractérisée précisément, par une méthode colorimétrique, par exemple), mais autour d’un signe aussi vague que “coloration anormale des urines”, voire simplement “urines anormales”46. À l’évidence, en sus des sujets effectivement contaminés par les pâtes Lustucru, on va recenser tous ceux dont les urines sont rouges, brunes ou rosées, etc. De telle sorte que lorsqu’on en viendra à l’enquête étiologique en interrogeant les sujets sur leurs antécédents et en leur faisant passer différents tests, la consommation du lot contaminé en provenance des usines Lustucru ne sera plus qu’une cause parmi d’autres (et pas nécessairement la plus fréquente), à côté d’autres bien mieux connues telles que hématurie (sang dans les urines), jaunisse ou consommation excessive de betteraves…

Il est ainsi démontré par l’exemple que lorsque les signes d’une maladie sont incorrectement caractérisés, sa cause – fût-elle parfaitement univoque comme en l’espèce (pâtes Lustucru) – peut se retrouver diluée, voire carrément noyée dans d’autres qui n’ont rien à voir – cette hétérogénéité étiologique légitimant ensuite les pires élucubrations. C’est exactement ce qui s’est passé avec les “myofasciites à macrophages” où, faute d’une caractérisation clinique soigneuse, on a pu voir rangés dans le même sac des accidents post-vaccinaux, des intoxications professionnelles, des maladies auto-immunes, des troubles psychiatriques, etc.

Dilution, disais-je. Dans les premières publications du GERMMAD, la proportion de patients avec un antécédent de vaccination contre l’hépatite B était supérieure à 85%47. On a vu plus haut que ce pourcentage va rapidement dégringoler à 67%, avant d’être considéré comme tellement anecdotique que plus personne ne l’évoque aujourd’hui comme central. Semblable dilution du facteur “vaccination contre l’hépatite B” a été rendue possible par la mise en cause indistincte de tous les vaccins aluminiques 48.

Le seul problème, c’est que dans un pays qui impose comme obligatoires un certain nombre de vaccinations (sachant de plus que les médecins accréditent comme obligatoires bien des vaccinations qui ne le sont pas) et où, selon les décomptes mêmes du GERMMAD, le nombre de vaccins contenant ou ayant contenu de l’aluminium s’élève à plus d’une trentaine, la probabilité qu’un individu ait reçu au moins un vaccin aluminique dans sa vie doit frôler 100%.

Ainsi et grâce à l’aluminium vaccinal, on est parvenu à identifier l’étiologie de la schizophrénie, du phimosis, de l’éjaculation précoce et de la crise de foie… Et aussi – j’allais oublier le plus important – de la danse de Saint-Guy.

Car à l’instar des patients souffrant de “myofasciite”, ils ont tous été exposés à des vaccins aluminiques…

Le pathologique et le normal

Par esprit de systématisation pédagogique, les manuels d’épidémiologie clinique se donnent généralement beaucoup de mal pour expliquer avec des mots ce qui paraît tellement évident qu’on y adhère habituellement de façon naturelle : pour pouvoir décréter qu’un signe (clinique ou paraclinique) serait “anormal”, encore faudrait-il avoir la moindre idée de sa valeur normale. Or, c’est précisément cette notion incontournable du “normal” qui fait totalement défaut au concept de myofasciite à macrophages – dont les auteurs nous répètent sur tous les tons qu’elle serait définie de façon “histologique” (pas de diagnostic sans biopsie).

On a déjà vu plus haut que les justifications “éthiques” pour rationaliser l’absence de biopsie musculaire chez les patients normaux étaient à tout le moins tirées par les cheveux: avec un minimum de créativité (surtout pour des chercheurs qui prétendent “savoir faire”), on aurait pu imaginer toutes sortes d’études, autopsiques, par exemple, ou encore chez des patients devant subir une intervention au niveau de l’épaule49, etc. De plus, il existe pas mal d’arguments – soit chez les animaux, soit sur des observations cliniques anecdotiques, soit dans la littérature assez abondante sur les lésions cutanées imputables à l’aluminium (cf. plus haut) – pour témoigner que les lésions censément “caractéristiques” de la myofasciite se retrouvent indépendamment de toute maladie générale, à titre de “tatouage” vaccinal consécutif à l’injection d’une substance effectivement irritante, l’aluminium. En tout état de cause, de toute façon – et surtout chez des gens qui aiment à se présenter comme de sourcilleux gardiens de la rigueur scientifique – évoquer “l’anormalité” d’un test diagnostique qui n’a pas été testé chez des sujets normaux relève d’une aberration, et un exemple imagé va, une fois encore, aider le profane à comprendre.

Imaginons une société où, pour des raisons religieuses, tout acte chirurgical serait interdit chez le sujet vivant, alors qu’il n’y aurait aucun interdit concernant la dissection chez les sujets décédés. Rapidement, on constaterait que dans une proportion notable de macchabées, on trouverait une tumeur musculeuse au milieu du petit bassin que l’on n’aurait encore jamais vue – et pour cause – chez un sujet “normalement” vivant. En suivant le raisonnement du GERMMAD, on en conclurait que cette tumeur – appelons-la “utérus” – encore jamais vu chez le vivant serait très régulièrement associée à cet état pathologique indubitable que l’on appelle “décès”; certains, parmi les plus audacieux du groupe, iraient même soutenir que, selon toute probabilité, cet utérus ne pourrait être que la cause du décès.

Holà! me direz-vous: et que faites-vous de la proportion non moins notable de cadavres dépourvus d’utérus? J’en fais exactement ce qu’a fait le GERMMAD: je les exclus du groupe à l’étude – à l’aide de n’importe quel argument ad hoc – en prétendant qu’ils sont en lévitation, que ce sont des martiens ou des simulateurs, etc. Car c’est un fait d’expérience que de tous les malades adressés au GERMMAD sur la base d’une symptomatologie susceptible de relever d’une “myofasciite”, une grande proportion d’entre eux se sont retrouvés avec une biopsie négative50, en tant que tels privés de diagnostic et renvoyés – parfois sans ménagement – à leur désespoir: comme me le disait l’une de celle à qui c’était arrivé, “j’ai la vie d’une victime sans en avoir le statut”.

On notera que contrairement à ce qu’on pourrait attendre chez des gens qui proclament que “les études, ils savent les faire”, on chercherait vainement dans les écrits du GERMMAD deux données pourtant méthodologiquement élémentaires pour réfuter l’argument précédent51: 1/ le tableau dénombrant la proportion de biopsies négatives 52 chez les sujets testés ; 2/ la méthode adoptée pour garantir que la lecture des lames de biopsie s’est bien faite en aveugle

Une caractérisation diagnostique tautologique

D’habitude, lorsque l’on cherche à poser le diagnostic ou à identifier l’étiologie d’une maladie, on part des signes ou symptômes cliniques: que serait une “maladie” sans signe ou sans symptôme53? On cherche à corréler ces derniers à divers examens complémentaires permettant d’en caractériser le tableau et, autant que possible, d’en cerner la cause avec un bon degré de probabilité: chez un patient qui jaunit (ictère), on cherchera à objectiver le jaunissement par un dosage de divers paramètres (dont la bilirubine, en particulier) et, une fois posé le diagnostic, on s’appliquera grâce à divers examens à rechercher si la cause est virale, ou toxique, ou immunologique, etc.

À cet égard, force est de constater que les membres du GERMMAD raisonnent strictement à l’envers : au lieu de prendre des sujets présentant tel ou tel tableau clinique et de leur faire une biopsie pour voir s’il existe à tout le moins une corrélation entre leur état et le résultat de cet examen complémentaire54, ils partent d’un échantillon de personnes ayant une biopsie censément “anormale” (nonobstant qu’ils ont omis de chercher ce qu’elle serait chez des sujets normaux…), cherchant ensuite à établir a contrario toutes sortes de corrélations avec une symptomatologie, des antécédents, des expositions antérieures.

Reprenons l’exemple précédent des pâtes Lustucru pour introduire à la notion fondamentale de faux positifs et de faux négatifs :

  • les faux positifs seront les sujets dont les urines seront bleues pour une toute autre raison – parce qu’ils ont avalé du bleu de méthylène par exemple, ou parce qu’ils ont un syndrome de Drummond55, ou qui présentent un “syndrome des urines bleues”56
  • les faux négatifs seront les sujets qui, par suite d’une particularité génétique, ont dégradé très rapidement le pigment bleu, ou ceux qui boivent tellement que la coloration sera trop diluée pour être détectable, ou ceux qui ont mangé des pâtes en si petite quantité que, là encore, la coloration sera indétectable.

Complétons par un exemple encore plus illustratif en considérant un état pathologique aussi caractérisé que le décès. Eh bien même là, il est parfois difficile d’acquérir une certitude:

  • si l’on s’en tient à des critères cliniques, tout le monde sait qu’il y a des erreurs – et la peur d’être enterré vivant travaille l’humanité depuis toujours;
  • si l’on s’en tient à des critères électro-encéphalographiques (EEG “plat”), on peut aussi avoir des surprises: chacun sait aussi que l’évaluation du pronostic fait partie des responsabilités les plus lourdes dans un Service de réanimation.

Ainsi, même par rapport à un état pathologique apparemment aussi “évident” que la mort, il est parfois difficile d’avoir une certitude : l’art du diagnostic, c’est précisément de slalomer autour de toutes ces incertitudes en vue d’aboutir à un degré de probabilité suffisant pour évaluer rationnellement le rapport bénéfice/risque des interventions qu’on va proposer au patient.

Sur la base de ces préliminaires, retournons donc à cette “nouvelle entité” pathologique nommée “myofasciite à macrophages”.

  • Quels en sont les signes ou symptômes cliniques ? Les auteurs du GERMMAD ne cessent de nous le rappeler, il n’y en a pas: “Les manifestations cliniques de la myofasciite à macrophages sont peu spécifiques et le diagnostic ne peut actuellement être établi que par la biopsie musculaire”57. Dès lors, de deux choses l’une: i/ ou bien la biopsie musculaire permet de repérer un état véritablement pathologique (présent ou à venir) – et l’on reste désespérément dans l’attente d’une description tant soit peu reproductible de cet état pathologique qui affecte ou va affecter les sujets concernés; ii/ ou bien la biopsie musculaire résume à elle seule l’état pathologique en question – et on s’en fout: on vit très bien avec une biopsie anormale. “La maladie, c’est ce qui gêne les hommes dans l’exercice normal de leur vie et dans leurs occupations et surtout ce qui les fait souffrir (…)”58 : on peine à voir ce qui fait souffrir dans le simple fait d’avoir une biopsie censément “anormale” et si tel n’est pas le cas, on attend, depuis maintenant quinze ans, une description précise de “ce qui fait souffrir”59.
  • S’il faut admettre qu’une biopsie anormale est nécessaire et suffisante pour poser le diagnostic, on est donc renvoyé à la situation suivante – strictement aberrante: conditionnant à elle seule le diagnostic, la biopsie musculaire caractérise une maladie définie par une biopsie musculaire anormale!!!. Pour le dire autrement: i/ quelle est cette maladie terrible que détecte une biopsie musculaire réputée anormale ? La myofasciite à macrophages. ii/ quel est le signe le mieux reconnu de cette maladie terrible ainsi nommée “myofasciite à macrophages”? Une biopsie musculaire réputée anormale… Plus vicieux comme cercle, on passe au carré…

Bref, jusqu’en 1999, on n’avait donc jamais d’état pathologique avec un test diagnostic efficace à 100%. Mais avec la “myofasciite à macrophages”, nous sommes entrés dans un ordre de certitude diagnostique absolument inédit en médecine: aucun faux positif, aucun faux négatif – du jamais vu…

De plus:

  • comme pour les pseudo-raisons éthiques évoquées plus haut, on ne fait pas de biopsie chez les gens en bonne santé, la quasi-totalité des personnes se retrouvant avec une biopsie s’étaient présentées comme initialement malades;
  • comme la symptomatologie supposée décrire la “myofasciite” se signale par son flou (fatigue, douleurs musculaires ou articulaires…), c’est bien le diable si l’on ne parvient pas à en trouver plus ou moins trace chez des malades réputés “positifs”.

Dès lors, la question n’est pas de savoir si une biopsie “positive” se retrouve associée à des signes pathologiques – supposés attester que l’examen détecte bien une maladie -, mais de comprendre pourquoi, pour une pathologie a priori comparable, certains (de 30 à 50% jusqu’à preuve du contraire – laquelle incombe au GERMMAD) se retrouvent avec une biopsie strictement normale60.

Ainsi et pour résumer, avec la biopsie musculaire telle que pratiquée selon les prescriptions du GERMMAD, on dispose d’un examen “diagnostique” dont on peut être certain qu’il “détectera” une maladie, attendu qu’il n’est pratiqué quasiment que chez des malades : la vraie question, mais qui n’est jamais posée, serait de savoir ce que deviennent ceux qui ont une pathologie strictement superposable, mais avec une biopsie négative…

Une caractérisation étiologique* tautologique

Ainsi évoqué le paradoxe d’une caractérisation diagnostique strictement tautologique (un test diagnostic qui définit les patients atteint d’une pathologie caractérisée par l’anomalie dudit test), venons-en à la caractérisation étiologique (quelle cause?).

Revenons au feuilleton Lustucru. Les choses vont encore se compliquer lorsqu’on va vouloir corréler la coloration urinaire bleue à une exposition aux pâtes en question:

  • on aura tous les hypocondriaques – certains, sous le coup de l’alerte médiatique, d’avoir avalé les pâtes en question -, tous les analphabètes61 qui confondent “Lustucru” et “Panzani”, les associations de victimes ou de consommateurs, inspirées par d’audacieux avocats (“lanceurs d’alerte”) assistés d’implacables médecins (“experts”) moins regardants sur la validation de l’exposition que sur la facturation de leurs honoraires, etc. : tous ceux-là contribueront aux faux négatifs, puisqu’ils seront réputés avoir consommé les pâtes contaminées sans pourtant présenter le symptôme-clé des urines bleues;
  • à l’inverse, on aura tous ceux qui ont été effectivement exposés, mais à leur insu, soit parce qu’ils auront cru avaler d’authentiques et onéreuses pâtes asiatiques “made in China” quand on leur aura refourgué en douce de banales Lustucru, ceux qui ne savent point et ne sauront jamais ce qu’ils ont mangé parce qu’il n’est pas d’usage que l’on demande à Belle-Maman ce qu’elle a mis dans ses casseroles quand on va déjeuner chez elle, etc.: tous ceux-là contribueront aux faux positifs, puisqu’ils se présenteront avec des urines bleues alors qu’on ne retrouvera jamais la preuve de leur exposition aux pâtes incriminées.

Lorsque le facteur causal suspecté ne sera plus la consommation de pâtes Lustrucru, mais l’exposition à des vaccins aluminiques dans un pays qui vaccine à tour de bras, n’importe quelle personne avec une biopsie positive aura été exposée à un ou plusieurs vaccins aluminiques: une fois encore, on n’aura plus ni faux positif, ni faux négatif.

La myofasciite est donc une entité nosographique définie par un examen complémentaire tautologique (une biopsie positive attestant qu’on est bien atteint par la-maladie-de-la-biopsie-positive) et causée par une étiologie non moins tautologique (une exposition à un vaccin aluminique dans un pays où tout un chacun a été exposé à de tels vaccins).

Plus rigoureux comme “recherche”, on meurt…

Une “étude” épidémiologique en forme de farce

Annoncée avec une insistante fierté dans toutes les publications initiales du GERMMAD, qui a manifestement vécu la collaboration avec les autorités sanitaires comme une caution scientifique62 , la grande “étude exploratoire épidémiologique de la myofasciite à macrophages” allait faire basculer dans la farce la comédie de la myofasciite.

Pour comprendre la pièce, rappelons les données factuelles qui l’avaient inspirée. Au début des années 1990, apparaissait dans le paysage clinique français un tableau clinique relativement inédit par sa fréquence quoique mal caractérisé par sa symptomatologie, mais dans lequel, bizarrement, on retrouvait des antécédents de vaccination contre l’hépatite B chez au moins 90% des patients (et probablement plus, compte tenu de l’anarchie d’une campagne ayant conduit à vacciner nombre de personnes plus ou moins à leur insu – et sans traçabilité).

Pour quiconque ayant un minimum de culture médico-scientifique, cette situation offrait donc deux pistes de recherche prioritaires:

  • préciser la symptomatologie des sujets atteints (en intégrant, tout particulièrement, les désordres cognitifs qui allaient échapper au GERMMAD durant près de dix ans);
  • confirmer le rôle de la vaccination contre l’hépatite B dans la genèse de ces troubles, pour autant toutefois que l’on manquât de la culture épidémiologique suffisante pour se rappeler l’exhortation de Hill63 à ne pas retarder les mesures qui s’imposent quand la surreprésentation d’une exposition (en l’espèce: celle aux vaccins contre l’hépatite B) était à ce point évidente.

C’est un B A BA, en principe connu de tous ceux qui “savent faire” de la recherche clinique, qu’il est dangereux de multiplier les objectifs d’une étude: s’il est une spécialité qui illustre l’adage qui trop embrasse mal étreint, c’est bien celle-là. Mais si la règle peut souffrir quelques exceptions – du moins entre des mains avisées -, il n’était pas même pas besoin de “savoir faire” pour craindre que celles auxquelles s’autorisaient le GERMMAD et ses alliés ne balayassent nettement trop large: le protocole arrêté, en effet, prévoyait simultanément; i/ de préciser la symptomatologie clinique; ii/ d’évaluer les antécédents des patients. En d’autres termes et pour illustrer la situation par une métaphore, il s’agissait de caractériser le crime et d’en identifier simultanément les coupables… Ce n’était plus, à proprement parler, mettre la charrue avant les boeufs, mais poser la charrue sur les boeufs – voire les boeufs sur la charrue: la partouze protocolaire, quoi…

Bien mieux encore: le second objectif (identifier les antécédents) se voyait lui-même éclaté en une multiplicité de sous-objectifs. Partis d’un trouble où la responsabilité de la vaccination contre l’hépatite B semblait a priori écrasante (au moins 90% des sujets), on évacuait cette évidence pour se tourner vers tous les vaccins “contenant un vaccin aluminique”64.

Sans entrer plus avant dans une analyse méthodologique qui dépasserait le cadre du présent article, on évoquera d’autres perles, largement susceptibles à elles seules (je ne parle pas de leur association) de rétrograder cette invraisemblable investigation à une plaisanterie de mauvais goût – bien entendu sur des fonds publics (l’étude étant financée par l’AFSSAPS):

  • le critère de recrutement des “cas” était… la biopsie musculaire “anormale” selon les critères du GERMMAD (à un moment où l’on savait déjà très bien que ces critères reposaient sur
    une insuffisance de référencement bibliographique et qu’une biopsie pouvait parfaitement se révéler “anormale” chez des sujets sans symptômes de maladie générale), décision qui n’allait certainement pas permettre de définir la juste place de cet examen complémentaire dans la définition du syndrome…
  • la fenêtre chronologique jugée compatible d’exposition à un vaccin était… de 20 ans: pour remettre en perspective l’absurdité d’une telle durée dans un pays de vaccinations obligatoires, rappelons que cette même administration sanitaire a réussi à durablement accréditer (notamment auprès du Conseil d’État et en dépit des preuves considérables attestant l’aberration de la chose) que la fenêtre d’exposition “compatible” avec la responsabilité d’un vaccin dans la survenue d’une sclérose en plaques ne devait pas dépasser… deux mois! Il faut une certaine obtusion mentale pour considérer que les effets neurotoxiques d’un vaccin ne peuvent s’exercer à plus de deux mois, tandis que ceux, beaucoup plus vagues, de la “myofasciite” pourraient se révéler jusqu’à 20 ans après la vaccination suspectée65!!!

Grâce à la caisse de résonance d’associations plus militantes que réfléchies – éventuellement renforcées de quelques voix parlementaires n’offrant guère plus de garanties en matière de réflexion critique -, le GERMMAD a réussi à accréditer depuis une dizaine d’années que les résultats de cette étude appelleraient une nouvelle analyse “indépendante” (d’où il ressort, soit dit en passant et a contrario, que le GERMMAD n’avait jamais eu peur de s’acoquiner avec des instances “dépendantes” – de qui, au fait ?). Mais ce qui transparaît d’ores et déjà de cette analyse-express qui pourrait être approfondie sur demande, c’est que c’est le principe même de cette étude qui était multi-déficient et qu’en aucun cas, on ne peut tenir les coresponsables d’un plan expérimental aussi déficient pour des gens qui “savent faire” en pareille matière.

De toute façon, quand bien même le protocole eût été “parfait” (ce qui n’était évidemment pas le cas en l’espèce) et avant d’émettre la moindre critique sur l’analyse des résultats (comme l’ont fait depuis dix ans le GERMMAD et de ses alliés), il convient d’examiner le déroulement de l’étude (c’est-à-dire la façon dont les prescriptions du protocole ont été, ou non, mises en oeuvre): simple question de “savoir-faire”, là encore… Or, et sans entrer non plus dans un détail disproportionné, il suffit de lire le rapport pour apercevoir des manquements graves dans la réalisation, largement de nature à invalider les résultats. Ainsi:

  • alors que (comme il se doit dans une étude de ce type), les enquêteurs n’étaient pas supposés connaître l’objectif du protocole (afin de ne pas influencer, même inconsciemment, les réponses de sujets interrogés), “ceci n’a pas pu être respecté” : on ne saura jamais pourquoi, mais c’est extrêmement gênant;
  • bien mieux, alors que les calculs de puissance statistique prévoyaient qu’il faudrait interroger 700 témoins pour discriminer les caractéristiques des sujets atteints, l’étude n’est parvenue à en trouver que… 114 – la fréquence des données manquantes pour ces derniers expliquant ensuite que les comparaisons n’aient jamais concerné un effectif de plus de 100 témoins (soit sept fois moins que l’effectif nécessaire);
  • dans cette étude qui devait inclure l’effectif considérable de 700 sujets et dont le deuxième objectif prioritaire était l’étude des antécédents vaccinaux, la comparaison n’a pu s’effectuer que chez… 20 cas et 26 témoins. D’expérience, on ne connaît aucun Viagra quand la puissance statistique s’effondre à ce point…

On relève à ce dernier sujet que parmi ces 20 cas (sujets avec une myofasciite) et les 26 témoins, 15 dans chaque groupe avaient été vaccinés contre l’hépatite B, soit 75% chez les cas et 58% chez les témoins. Or, on l’a déjà souligné, le pourcentage de sujets exposés à cette vaccination était alors d’au moins 90% chez les sujets réputés d’une myofasciite, alors que, sur la base des données alors disponibles, on peut estimer à 30-35% le pourcentage de la population normale exposée à cette vaccination. Relativement à la comparaison pourtant cruciale de l’étude, on en arrivait donc à un pourcentage chez les cas inférieur à celui normalement attendu, tandis qu’il était quasiment double chez les témoins: chez ceux qui “savent faire” des études épidémiologiques, cela s’appelle un BIAIS, et il est grossier…

J’ai introduit cette étude en parlant de “farce”, mais si j’en crois Le Grand Robert (qui renvoie également à “facétie”), c’est tout aussi bien “imbroglio” que j’aurais pu évoquer, à savoir: “Pièce de théâtre dont l’intrigue est très compliquée, obscure”…

Résumons. Avant l’étude, nous avions: i/ une pseudo entité nosographique (“myofasciite”) extrêmement mal définie cliniquement ; ii/ nonobstant ce flou, les responsables du projet admettaient qu’une exposition à la vaccination contre l’hépatite B se retrouvait chez 90% des patients, au minimum.

Moyennant quoi, au terme de cette étude menée “à l’américaine”:

  • on n’en sait toujours pas plus sur le profil clinique de l’entité en question, qui reste ancrée sur une caractérisation entièrement tautologique: sont réputés souffrir de “la maladie de la biopsie anormale” (myofasciite à macrophages) ceux des malades qui ont une biopsie anormale;
  • retrouvée à une fréquence largement suffisante pour dispenser de toute investigation sur l’étiologie, l’exposition spécifique à la vaccination contre l’hépatite B a disparu corps et biens au profit d’une étiologie quasi tautologique dans un pays de vaccinations obligatoires: une exposition à un vaccin aluminique.

Réussir à ranger au rang des circonstances indifférentes une exposition retrouvée chez au moins 90% des sujets, fallait le faire: ils l’ont fait… Au terme de quoi, s’il est toujours aussi difficile de croire les membres du GERMMAD lorsqu’ils vantent leur expertise en recherche clinique, on ne saurait leur en contester une autre: les enterrements de première classe, ça oui, ils “savent faire”…

La mystification à l’oeuvre

Une fois ainsi crédibilisée de façon aussi inepte l’existence d’une pathologie liée à l’aluminium, l’imagination peut se donner libre cours – et toujours selon la même dynamique : moins c’est précis, plus c’est facile d’y caser tout et n’importe quoi, la démonstration se renforçant en proportion de son volume, plus que de sa rigueur. Je ne compte pas le nombre de réactions post-vaccinales qui me sont rapportées comme le plus probablement dues à l’aluminium (voire, puisqu’il n’y a aucune raison de s’arrêter en si bon chemin d’extrapolation: aux adjuvants) – évidemment sans le moindre élément de preuve ni physiopathologique, ni – encore moins – épidémiologique. N’importe quelle observation partielle, si limitée soit-elle, devient prétexte, avec les secours d’une imagination débordante, à élargir encore le spectre des réactions réputées dues ou quasiment dues à l’aluminium: l’Alzheimer, le Parkinson, les scléroses en plaques, j’en passe et des meilleures.

S’il était encore besoin de caractériser l’indigence des raisonnements qui ont conduit à la promotion de cette tautologie baptisée “myofasciite à macrophages”, arrêtons-nous un instant sur la question des modèles animaux. Alors que n’importe quelle donnée animale, si partielle et problématique soit-elle, se voit désormais exploitée au bénéfice d’extrapolations plus qu’audacieuses, il est quand même ennuyeux que le GERMMAD n’ait jamais pris au sérieux la moins contestable des données animales : à savoir la facilité avec laquelle on peut reproduire chez l’animal la lésion prétendument “caractéristique” de la myofasciite, sans qu’elle soit jamais associée à quelque symptôme général que ce soit. La portée de cette observation qui, à ma connaissance, n’est pas mise en cause, va pourtant de soi: elle suggère très fortement que la fameuse lésion censément “caractéristique” n’est qu’un banal tatouage lié à l’introduction d’un matériel notoirement irritant, l’aluminium.

A l’instar des membres du GERMMAD, les quelques contributeurs qui alimentent le buzz autour de l’aluminium raisonnent eux aussi strictement à l’envers. Classiquement:

  • quand on part de la paillasse, les observations faites in vitro ou chez l’animal attendent, pour voir confirmée leur signification ou leur extrapolabilité, de se trouver corrélées à des observations cliniques suffisamment univoques et reproductibles;
  • à l’inverse et quand on part de la clinique ou de l’épidémiologie (lorsqu’une toxicité nouvelle se trouve suspectée, par exemple), on essaie de mettre en place des études in vitro ou animales dont le protocole est rigoureusement défini à partir des observations collectées chez l’homme (notamment en termes de doses administrées, de voies d’administration, de correspondances métaboliques, etc.).

Il n’y a rien de semblable dans la littérature qui fleurit actuellement sur la toxicité de l’aluminium: une fois tenue pour acquise la toxicité de l’aluminium chez l’homme sur la base des résultats plus que problématiques du GERMMAD, n’importe quelle observation – si anecdotique, problématique ou dispersée qu’elle soit – se voit réputée resserrer l’étau des preuves attestant la toxicité de ce métal (voire, soyons fous: la toxicité des adjuvants en général), tandis que par un admirable retour de manivelle, ce resserrement se voit lui-même interprété comme une confirmation additionnelle des “résultats” obtenus par le GERMMAD. Une parfaite illustration de cet embrouillamini pharmaco-toxico-clinico-épidémiologique est fournie par l’article désormais culte de Tomljenovic et Shaw66 qui se borne à un fatras de résultats partiels, in vitro ou in vivo, chez l’animal ou chez l’homme, présentés en vrac sans le moindre essai pour évaluer leur signification clinique ou épidémiologique : par rapport au risque d’une injection sous-cutanée ou intramusculaire de vaccin antitétanique, on peut s’interroger, par exemple, sur la portée d’observations collectées chez des patients dialysés exposés, plusieurs fois par semaine et durant plusieurs années, à de l’aluminium par voie intraveineuse67. Adossé au rappel des travaux du GERMMAD présentés comme épine dorsale de l’ensemble, cet amoncellement vide de signification médico-scientifique tient son pouvoir d’attraction de trois ficelles pourtant parfaitement classiques :

  • un effet d’accumulation68;
  • le court-circuitage de toute démonstration par l’évocation de mécanismes tous plus ingénieux les uns que les autres quoique parfaitement hypothétiques69; c’est l’occasion de rappeler que cette tendance à évoquer des mécanismes admirables quoique purement conjecturaux, a été et reste la principale ligne de défense de Big Pharma contre les exigences nettement plus ascétiques de la recherche clinique et que, pour le plus grand malheur de la santé et des finances publiques, cette rhétorique pseudo-scientifique enracinée dans le merveilleux exerce toujours la même fascination chez les professionnels de santé, dont la majorité, à l’évidence, n’a jamais sérieusement réfléchi au système de preuves propre à leur spécialité70;
  • les extrapolations hasardeuses, parfaitement illustrées par l’enthousiasme du GERMMAD71 à en faire une étape fondamentale dans l’élucidation d’autres questions aussi floues que la “fatigue chronique” ou le “syndrome de la guerre du Golfe” 72. Prétendre éclairer quelque chose d’aussi vague que “le syndrome de la guerre du Golfe” par une innovation aussi déficiente que celle des “myofasciites à macrophages”, c’est expliquer l’énigme de Kaspar Hauser par celle du Masque de fer – ou réciproquement (avec la Bête du Gévaudan comme joker)…

Et les malades, bordel?

Un bien étrange syndrome algo-musculo-neuro-cognitif

Contester, comme on l’a fait ici (vous aviez suivi?), la moindre pertinence médicale ou scientifique au concept de “myofasciite à macrophages”, ne va pas toutefois jusqu’à soutenir qu’il n’y a pas un vrai problème pathologique – assorti d’une immense souffrance humaine – derrière tout ça. Pour essayer de l’éclaircir, revenons aux données de base avant que le GERMMAD ne s’en soit emparé.

Au début des années 1990, on l’a dit, on voit apparaître dans le paysage clinique français une entité plus frappante par sa fréquence que par la spécificité de sa symptomatologie. S’il s’agit de s’en tenir le plus factuellement possible à la clinique, on pouvait définir cette entité comme un syndrome algo-musculo-neuro-cognitif caractérisé par:

  • des douleurs diffuses, notamment à la pression des masses musculaires et au niveau des articulations;
  • une faiblesse musculaire;
  • une asthénie et une fatigabilité en imposant pour une fatigue chronique;
  • des troubles, souvent majeurs, de la mémoire, de l’attention et de la concentration.

Une étiologie* manifestement vaccinale

Caractérisation cette fois négative, mais d’une immense portée en termes de diagnostic d’exclusion : quoique énergiquement pris en charge dans des services hospitaliers souvent d’une grande compétence, soumis à d’innombrables explorations diagnostiques (parfois même d’ordre purement expérimental), les patients en question ne se voyaient jamais découvrir la moindre cause à leur pathologie. Typiquement la situation où, faute de mieux, on commence à s’interroger sur le rôle possible d’un médicament

Or, dans l’immense majorité des cas (90% environ), ces anomalies survenaient chez des sujets ayant été vaccinés contre l’hépatite B, et ce n’est pas forcément un hasard que le premier cas répertorié par le GERMMAD soir survenu chez une infirmière, c’est-à-dire dans la profession qui (avec celle d’aide-soignante) a été en première ligne pour les conséquences iatrogènes d’une obligation vaccinale définie, dès janvier 1991, par ce qui était alors l’article L.10 du Code de la Santé publique. D’expérience et pour les raisons exposées plus haut (faux positifs, faux négatifs, erreurs de remémoration…), un tel pourcentage est habituellement très suffisant pour justifier la mise en cause du médicament auquel les patients concernés ont été si massivement exposés73.

Mais déjà obsédée par l’impérieuse nécessité de nier la catastrophe épidémiologique liée au potentiel neurotoxique pourtant évident du vaccin contre l’hépatite B, la profession médicale dans son immense majorité, en parfaite collusion sur ce point avec les autorités sanitaires, n’allait quand même pas charger encore la barque en reconnaissant une nouvelle complication potentielle de ce vaccin!

Au risque de l’incompétence

Cependant, une fois desserré l’étau des soupçons concernant les scléroses en plaques – grâce à des manipulations et falsifications innombrables et avec, il faut le dire, l’appui enthousiaste des associations de victimes74 – quelque chose a peu à peu changé dans le discours sur la “myofasciite”: il est désormais courant d’entendre dire que les victimes auraient “tous” les symptômes d’une sclérose en plaques, à l’exception des plaques de démyélinisation à l’IRM.

Dans les lignes qui suivent, j’implore l’indulgence de mes lecteurs, qui savent qu’il n’est pas dans mes habitudes de m’engager sur des chemins où je n’ai pas la compétence requise. Mais sur le problème du vaccin contre l’hépatite B où, que ce soit sur les aspects cliniques ou expérimentaux, la pleutrerie des professionnels spécialistes a été à ce point généralisée, il faut bien se risquer à faire soi-même le boulot devant lequel reculent frénétiquement ceux qui seraient le plus naturellement désignés pour le faire. Cela posé et sous toutes les réserves de mon incompétence assumée en neurologie, dans les nombreux cas de SEP post-vaccinales que j’ai eus à étudier, mes confrères neurologues semblaient souvent frappés par la discordance entre l’intensité des symptômes cliniques et la relative discrétion des lésions mises en évidence à l’IRM75. Soit dit en passant, semblable atypie dans les signes d’une maladie “naturelle” (comme peut l’être la SEP) est souvent un indicateur d’une origine iatrogène ou toxique.

Sous toutes les réserves de mon incompétence neurologique – j’y insiste – j’en viens à me dire que si les scléroses en plaques post-vaccinales 76 ont une telle propension à produire des lésions démyélinisantes aussi discrètes, rien n’empêche, après tout, d’imaginer un processus post-vaccinal de démyélinisation microscopique – en tout cas inférieur au pouvoir de résolution de l’IRM.

Il s’ensuivrait donc que les patients qui ont développé, après vaccination contre l’hépatite B, ce syndrome algo-musculo-neuro-cognitif (et qui, grâce à l’examen tautologique de la biopsie deltoïdienne, se sont trouvés attraits dans l’entité fantasque de “myofasciite”), souffriraient le plus probablement d’une forme de sclérose en plaques atypique, caractérisée justement par l’infimité des lésions de démyélinisation objectivables à l’IRM. J’en termine là avec ma prestation d’incompétence assumée, non sans remarquer, toutefois, que si j’en crois certains bruits de couloir en provenance de ces Services éminents où l’habitude est de dire publiquement le contraire de ce qu’on chuchote tout bas, certains confrères dont la compétence neurologique (je ne parle pas de l’intégrité morale…) ne peut, cette fois, être mise en doute ne seraient pas loin de partager mon analyse…

Bilan diagnostique

Il résulte de toutes les considérations qui précèdent que les patients réputés souffrir de cette entité extravagante appelée “myofasciite à macrophages” relèvent en fait de trois catégories étiologiques.

  1. Ceux qui souffrent le plus probablement d’une pathologie démyélinisante atypique, causée par une vaccination contre l’hépatite B. Il convient d’ajouter à cette sous-population tous les patients qui présentent exactement la même pathologie, mais qui, pour avoir été biopsiés du mauvais côté ou simplement à côté de leur tatouage aluminique, ont été renvoyés à leur errance diagnostique et à leur désespoir par les gens du GERMMAD ou par leurs affidés77.
  2. Ceux qui ont des symptômes proches, mais d’origine toxique, infectieuse ou auto-immune: on ne peut pas les forcer à se trouver des antécédents de vaccination contre l’hépatite B s’ils n’en ont pas, mais dans un pays où il est fait obligation à tous de recevoir des vaccins aluminiques, ils ont d’excellentes raisons pour satisfaire les critères du GERMMAD et être classés pour rien dans la catégorie “myofasciite”.
  3. Les hypochondriaques et autres patients fonctionnels ou psychiatriques78 qui ont bien le droit d’être toujours fatigués et d’avoir mal partout, tout en ayant reçu un ou plusieurs des vaccins aluminiques qui leur permettent de satisfaire les critères du GERMMAD. Le malheur, pour la recherche clinique, c’est que par rapport aux précédents – qui sont, eux, vraiment malades – ce sont évidemment ceux de cette troisième catégorie qui ont le plus de force pour gueuler dans les médias, imposer leur point de vue fût-il débile et s’engager inépuisablement dans des procédures douteuses, avec parfois l’appui d’avocats qui ne le sont pas moins79

Conclusion

Dans le mouvement de “recherche clinique” qui s’est introduit en médecine à partir de la seconde moitié du XXe siècle, la France a fait longtemps figure de parent pauvre relativement au leadership anglo-saxon. Cependant et inversement, du point de vue cette fois de la simple clinique, la France est restée longtemps une nation d’excellence: quels que soient leurs défauts humains, leur étroitesse d’esprit ou leur rigidité, on finissait toujours par trouver des spécialistes qui, au moins dans leur domaine, étaient d’un savoir et d’un savoir-faire encyclopédiques. Pour l’exprimer autrement, il valait mieux aller en pays anglo-saxon si l’on voulait sérieusement évaluer – en moyenne – un médicament ou un traitement ; mais pour soigner un proche ou soi-même – pour soigner individuellement – il valait souvent mieux venir en France.

Quoi qu’on en dise et pour des raisons qui dépassent le cadre du présent exposé mais qui affleurent dans pas mal de mes contributions, la France n’a jamais vraiment fait le saut de la recherche clinique ou de l’evidence-based medicine: il y a bien sûr des exceptions individuelles, mais cette médecine à visée “scientifique” n’est décidément pas dans les moeurs de notre Faculté. Ce qui a changé, en revanche, c’est l’enseignement et la transmission de la clinique, dont la qualité et l’efficacité se sont tragiquement effondrées80 – à diverses exceptions individuelles près, une fois encore.

L’histoire de la myofasciite à macrophages – mais plus encore : sa réception dans le public spécialisé ou non – s’inscrit dans cette évolution catastrophique. Elle illustre parfaitement ce qui peut sortir d’une clinique approximative (pour rester gentil) associée au degré zéro d’une “méthodologie” dont les rudiments – et même la terminologie élémentaire – ne sont clairement pas maîtrisés. Moyennant quoi:

  • faute de savoir chercher dans la littérature, on qualifie de “nouvelle” une entité histologique pourtant décrite depuis fort longtemps et on fait un tapage sur cette découverte qui n’en est pas une;
  • on définit une “maladie” sur la seule base de cette histologie fallacieusement originale;
  • on qualifie les signes et symptômes de cette maladie de “peu spécifiques” ou de “stéréotypés” selon les besoins du jour, en ignorant de toute façon ceux qui sont les plus constants;
  • on norme un examen complémentaire déterminant sans se soucier de connaître ses valeurs chez les sujets normaux;
  • on clame à qui veut l’entendre que “les études, on sait faire”, quand on imagine qu’il suffit d’avoir des critères d’inclusion et d’exclusion pour garantir une étude “à l’américaine” et qu’on trébuche sur la terminologie basique des statistiques élémentaires81

Dans Le Monde d’hier, un tel florilège d’incongruités aurait servi de cas d’école pour l’édification des étudiants en tout début de formation: aujourd’hui, quasiment aucun professionnel n’ose rien dire82, les autorités valsent-hésitent, tandis que les politiques se bousculent pour assurer de leur indéfectible soutien les responsables d’une aussi consternante accumulation d’inepties. Je ne parle pas des associations, des médias ou des forums internet…

Tout cela nous conduit au titre de ce que sera notre prochaine contribution consacrée à la mystification de la “myofasciite à macrophages”: À qui ça profite?

Glossaire

anamnèse : renseignements fournis par le patient (ou son entourage) sur l’histoire de sa maladie

anatomo-pathologie : étude morphologique des tissus malades (en l’espèce, le terme vise l’analyse microscopique des biopsies musculaires)

arthralgie : douleur articulaire

cytoplasme : peu ou prou, partie de la cellule autour du noyau

étiologie : étude des causes des maladies

histologie : étude microscopique des tissus

mnésique : relatif à la mémoire

myopathie : maladie musculaire

nosographie : classification analytique des maladies

pathognomonique : caractéristique d’une maladie, qui n’appartient qu’à elle

pithiatisme : troubles répondant à la suggestion et à la persuasion

sémiologie : étude des signes des maladies

  1. Au point, parfois, de légitimer leur envahissement de l’espace public par une fonction de “journaliste” qui n’a jamais existé que dans leur fantasme et qui, surtout par les temps qui courent, résonne de façon plutôt incongrue dès lors qu’elle vise à crédibiliser quelque prétention de sérieux que ce soit…
  2. Rappelons ses honteuses dénégations lorsque est apparue l’alerte des narcolepsies, ou celles concernant les pilules de 3e génération (sur lesquelles on entretient des doutes depuis 1995.), ou encore celles qui ont marqué la publication, en 2004, de l’étude de Hernan et coll. sur le risque neurotoxique considérable de la vaccination contre l’hépatite B. Si j’en crois la presse, le Pôle santé, avec son habituelle réactivité (Le Point, 17/06/14), se serait enfin avisé que l’agence du médicament pourrait avoir sa part de responsabilité dans l’affaire Médiator…
  3. Comme illustré par l’affectation éminemment risible de Trouvin dans le reportage Le virus du doute diffusé sur France 5 le 14/02/12: le même (ancien président de la commission d’autorisation de mise sur la marché) s’était montré beaucoup moins solidaire avec les victimes au procès en appel de l’hormone de croissance…
  4. Je ne parle pas de la tuberculose, des cancers d’origine environnementale ou iatrogène, de l’obésité liée à la malbouffe ou des surdités juvéniles imputables à l’abus des baladeurs, des scléroses en plaques et autres pathologies auto-immunes, de la surmédicalisation des personnes âgées, des résistances antibiotiques, des génériques…
  5. Les fidèles visiteurs de ce site savent que je ne tiens pas les succès de publication pour un critère de sérieux ou de valeur… Mais l’ironie, ici, tient au contraste entre l’infimité du problème de la “myofasciite” tel que reflété par les publications disponibles et l’unanimité d’intérêt manifesté par des gens qui ont pourtant une inclinaison facilement documentable pour la falsification de l’évidence ou encore – selon leurs fonctions – pour les effets de paillettes (n’est-ce pas Gérard?)
  6. L’astuce rhétorique est double, mais éculée: 1/ cette référence à “la” Science évite de répondre précisément à la critique; 2/ elle permet de disqualifier l’interlocuteur. C’est une variante de cette autre vieille blague adorable: “tous les experts pensent que…” (entendez que si vous ne pensez pas comme ça, vous n’êtes pas un expert…)
  7. Et pour dépolitiser tout débat, si justifié soit-il (comme c’est particulièrement le cas en l’espèce).
  8. Chérin P. et coll. Apparition d’une nouvelle entité: la myofasciite à macrophages. Rev Rhum 1998; 65: 593-5.
  9. Lancet 1998; 352: 347-52.
  10. Gherardi RK et coll. Macrophagic myofasciitis lesions assess long-term persistence of vaccine-derived aluminium hydroxide in muscle. Brain 2001;124:1821-31.
  11. Chérin P. La myofasciite à macrophages. 6e Journées nationales de la Société Française de Rhumatologie, Brest, 24-26 mai 2001.
  12. Malgré sa fausseté facilement vérifiable, cette argumentation a été fortement médiatisée dès 2001; un article paru dans Sciences et Avenir de novembre 2001 et fondé sur une interview des membres du GERMMAD indiquait dès son chapeau: “Un nouvel adjuvant dans les vaccins: l’hydroxyde d’aluminium. Une nouvelle pratique: la vaccination intramusculaire remplaçant la piqûre sous-cutanée” (c’est moi qui souligne). Treize ans après, j’attends encore une réponse au courrier du 23/11/01 que j’avais adressé à l’auteur pour lui signaler cette double erreur…
  13. Gherardi RK et coll. La myofasciite à macrophages: une nouvelle entité. Rev Méd Interne 1998; 19: 617-8.
  14. Le résumé en anglais ne permet pas de contourner cette difficulté linguistique: d’une part parce qu’il ne permet pas d’entrer dans le détail, d’autre part parce que de nombreuses publications sont dépourvues de résumé.
  15. Slater D, Underwood J, Durrant T, al. Aluminium hydroxide granulomas. British Journal of Dermatology. 1982 ;107:103-8.
  16. Chérin P et coll. Apparition d’une nouvelle entité (…), op. cit..
  17. Gherardi RK et coll. Macrophagic myofasciitis lesions assess long-term persistence (…), op. cit.
  18. Au titre de l’éthique scientifique, on aurait pu également imaginer que les auteurs du concept de myofasciite aient eu à coeur de rétracter celles de leurs publications qui avaient ainsi présenté – à tort – comme “nouvelle” une lésion parfaitement décrite depuis des décennies.
  19. Parfois obsessionnellement: penser au cours de pathologie interne de Dieulafoy (apparemment modèle de “l’imbécile grand clinicien” selon Proust) et qui, au début du 20e siècle, consacrait des pages et des pages à décrire les manifestations de la “paralysie générale”.
  20. Ferreiro A. et coll. Macrophagic myofasciitis: some clue for muscle biopsy approach. Neuromuscular disorders 1999; 9: 478.
  21. ibid.
  22. Authier FJ et coll. Central nervous system disease in patients with macrophagic myofasciitis, Brain 2001; 124: 974-983.
  23. Gherardi RK & Authier FJ, Aluminium inclusion macrophagic myofasciitis: a recently identified condition. Immunol Allergy Clin N Am 2003; 23: 699-712.
  24. Oubliée depuis lors, la promotion initiale par le GERMMAD du traitement par corticothérapie ou antibiothérapie jette aussi une ombre sur la pertinence des symtômes-cibles répertoriés par les médecins de cette organisation… Il va de soi que chez des patients souffrant des pathologies auto-immunes susmentionnées, une corticothérapie a pu se solder par une amélioration transitoire; quant à l’efficacité des antibiotiques, il eût été utile de la tester – mais rigoureusement – contre celle d’un placebo… Parmi les autres “reniements” imputables à la désinvolture sémiologique des auteurs, on relèvera également “la fièvre”, présentée comme signe à tout le moins significatif dans les premières publications du groupe, et semble-t-il bien oubliée depuis…
  25. Il faut donc un certain aplomb à l’un des fondateurs du GERMMAD pour soutenir sans rire que les symptômes de la maladie “sont suffisamment stéréotypés” (Gherardi RK. Myofasciite à macrophage et hydroxyde d’aluminium: vers la définition d’un syndrome des adjuvants. Rev Neurol 2003; 159: 162-4.). Aplomb d’autant plus détonnant que le même, la même année, ne craint pas d’écrire que les patients atteints de la maladie “ont des symptômes peu caractéristiques” (Immunol Allergy Clin N Am 2003; 23: 699-712): faudrait savoir!…
  26. Cherin P. et coll. Neurocognitive involvement in macrophagic myofasciitis: a prospective study. Arthritis A Rheumatism 2003; 49 (9 suppl.): S313.
  27. Ce stupéfiant retard des médecins du GERMMAD à prendre en compte une symptomatologie neurocognitive pourtant cardinale m’a été confirmé par diverses victimes, ainsi que par le président d’une association de malades.
  28. Dans une de leurs publications, les auteurs du GERMMAD justifient par des “raisons éthiques” de ne pas l’avoir pratiqué systématiquement chez des sujets normaux, ce qui en dit long sur l’innocuité du geste…
  29. L’expérience atteste que les patients – qui ont de plus des troubles mnésiques* souvent importants – sont loin de se rappeler à quel endroit ils ont été vaccinés et, de toute façon, qui d’entre nous se souvient de l’endroit où a été administré son dernier rappel de tétanos? De plus et dans un grand nombre de cas pédiatriques, des enfants ont été vaccinés totalement à l’insu de leurs parents, ce qui ne facilite quand même pas le repérage du site d’injection…
  30. Papo T. Myofasciite à macrophages: maladie systémique ou tatouage post-vaccinal? Rev Neurol 2007; 163: 981-4.
  31. J’aime bien celle du chirurgien à qui l’on demande si l’intervention s’est bien passée, et qui balbutie en blêmissant: “je croyais que c’était une autopsie!”… Cela n’a pas forcément grand-chose à voir avec l’espèce, mais c’est juste pour détendre l’atmosphère.
  32. Requérant une quantité non négligeable de tissu musculaire, la biopsie musculaire – outre son caractère intrinsèquement désagréable – laisse une cicatrice assez disgracieuse, au niveau d’une zone (l’épaule) qui peut être assez souvent découverte, notamment chez les femmes.
  33. C’est une autre dérive de la médecine moderne, dont malheureusement les membres du GERMMAD n’ont pas le monopole, que – ne serait-ce que par son coût iatrogène et économique – est difficile de justifier quelque examen complémentaire que ce soit lorsqu’il n’élargit pas l’éventail des traitements disponibles.
  34. Chérin P. et coll. Apparition d’une nouvelle entité (…), op. cit.
  35. Que le nodule soit présenté comme “régressif” par le Vidal n’est pas une raison suffisante pour l’opposer à la lésion prétendument caractéristique et durable de la myofasciite: d’une part, parce qu’on connaît la tendance des notices Vidal à la minimisation des réactions indésirables (surtout quand elles sont post-vaccinales), d’autre part parce que l’éventuelle disparition d’un nodule macroscopique ne dit rien sur l’histologie résiduelle du tissu sous-jacent.
  36. Chérin P., de Jaeger C., Teixeira A. et coll. Troubles neurocognitifs dans la myofasciite à macrophages. Rev Méd Int 2002; 23 (Suppl 1): 109s.
  37. Surtout compte tenu de la propension facilement repérable du Pôle santé à décider des mises en examen qui finissent en eau de boudin après des instructions interminables…
  38. Ça la fout d’autant plus mal qu’en parallèle et sans jamais fournir le moindre argument sérieux pour justifier une spécificité de compétence, le GERMMAD – avec l’aide bruyante de certaines associations – revendique sans cesse de voir reconnaître les Services où travaillent ses membres comme “centres de référence” pour le dépistage et le traitement de la myofasciite.
  39. Chérin P et coll. Stress oxydant dans les myofasciites à macrophages: étude comparative par rapport à une population témoin appariée. Rev Méd Int 2001, 22 (suppl. 4): 546S-547S.
  40. Gherardi & Authier, Aluminium inclusion (…)
  41. Stigmate parmi d’autres d’une inculture scientifique hélas quasi ubiquitaire désormais : les auteurs du rapport ne craignent pas de présenter leurs pourcentages à la décimale près (soit à avec une précision de 1/1000), alors que l’incertitude portant sur l’effectif réel des patients concernés (et jugée comme manifestement tolérable) est de… 31% (n = 47 dans le pré-rapport, n = 36 dans la version finale) !
  42. Ce qui, soit dit en passant, recoupe peu ou prou l’analyse qui a précédé, mais sur de tout autres bases (sur lesquelles nous reviendrons également).
  43. On apprenait ça naguère en sections scientifiques du lycée…
  44. Présomption d’innocence oblige…
  45. “Les manifestations cliniques révélatrices étaient non spécifiques” (Rev Rhum 1998; 65: 593.) “Les manifestations cliniques de la myofasciite à macrophages sont peu spécifiques” (Rev Méd Int 1999; 20: 488.)
  46. Soit dit en passant, pour stupéfiants qu’ils soient, les dérapages terminologiques de ce type sont monnaie courante dans la “recherche” clinique d’aujourd’hui: j’ai décrit ailleurs ces rhabdomyolyses carabinées sous statine anonymisées en “anomalie enzymatique” ou “anomalie rénale”…
  47. Brain 2001; 124: 1821-1831. Oralement, un responsable du GERMMAD m’avait confié: “plus de 90%”.
  48. Rev Neurol 2003; 159: 162-4.
  49. Evidemment sous couvert de leur consentement…
  50. Fondé sur des approximations plus qu’approximatives du GERMMAD (“nous n’avons pas les chiffres exacts (…) mais la fourchette (…) n’est pas déraisonnable”…), un article du Quotidien du médecin estime que pour des symptômes “tout à fait analogues”, on trouverait en France environ 700-à 800 de patients avec une biopsie positive contre 300 à 400 avec une biopsie négative – ce qui correspond déjà à un taux énorme de négativité (aux alentours d’un tiers). Vers la même époque et de façon orale, l’un des chercheurs concernés m’avait avoué que pour des symptômes similaires, la proportion de biopsies positives ou négatives était à peu près de 50/50: cette proportion correspond, faut-il le préciser, au taux de négatifs attendu si le test (la biopsie en l’occurrence) est dépourvu de la moindre valeur prédictive…
  51. Guyatt G. et al. A manual for evidence-based clinical practice. 2nd ed, JAMA evidence, 2008: p. 421.
  52. A priori négligeable s’il faut en croire que “les symptômes sont suffisamment stéréotypés pour permettre de prédire la détection des lésions à la biopsie musculaire” ; a posteriori préoccupante s’il faut en croire les aveux susmentionnés des mêmes évaluant à au moins un tiers des cas la proportion des biopsies négatives…
  53. Une maladie, c’est “un ensemble de symptômes, de signes physiques, et d’anomalies d’examens de laboratoire” (Fletcher et coll., Epidémiologie clinique, Editions Pradel, 1998: p. 5)
  54. La terminologie médicale est suffisamment parlante: un examen est “complémentaire” précisément parce qu’il s’impose dans un second temps, une fois inventoriés les signes et symptômes qui justifient d’y avoir recours.
  55. Maladie héréditaire rare qui se caractérise notamment par l’urine du patient qui devient bleue au contact de l’air.
  56. Revue de médecine interne, 2000, 21 Suppl 2, 250s.
  57. Rev Méd Int 1999; 20: 483-9. C’est moi qui souligne.
  58. R. Leriche, cité par Le Grand Robert
  59. Sachant que si les membres du GERMMAD s’avisaient enfin de préciser objectivement “ce qui fait souffrir” dans une biopsie réputée anormale, on pourrait enfin mettre la charrue après les boeufs, à savoir recruter d’abord ceux qui éprouvent cette souffrance, puis les soumettre à une biopsie afin de vérifier dans quel pourcentage de cas celle-ci est “anormale” – bref: faire en vrai de la recherche clinique…
  60. On notera que le recensement des personnes malades se retrouvant avec une biopsie négative ne relève plus, cette fois, d’un prétexte éthique, mais ressortit d’une intégrité scientifique qu’on voudrait croire basique: on attend avec intérêt le recensement détaillé établi par le GERMMAD.
  61. Il y en a de plus en plus grâce aux super Pédagogues qui font la loi dans l’Education nationale.
  62. En quoi d’ailleurs, les membres du GERMMAD donnaient une nouvelle preuve de leur inexpérience : de mémoire, on n’a jamais vu l’AFSSAPS collaborer avec quiconque sans avoir une idée très claire des résultats auxquels elle entend parvenir coûte que coûte (même si les diverses associations trop fières d’être accueillies là-bas – et, parfois, subventionnées -, au nom d’une “démocratie sanitaire” inventée par Kouchner, semblent peiner à s’en rendre compte…).
  63. Hill AB. The environment and disease: association or causation? Proc R Soc Med. 1965 1965 May;58:295-300.
  64. Du même coup, on se retrouvait exactement avec la même manipulation que celle de l’étude IPPHS sur les anorexigènes fenfluraminiques laquelle, n’en déplaise à I. Frachon qui n’a manifestement rien compris, a permis à Servier – avec la complicité objective des amis de celle-ci – de maintenir, et même de développer, ses intérêts commerciaux durant des années (et de mettre en place l’alternative Médiator): sur la base d’un risque net d’hypertension artérielle pulmonaire lié aux produits de Servier, en effet, on partait dans une étude – financée par Servier mais cautionnée par l’administration sanitaire et ses meilleurs-experts – dont l’urgence était désormais d’examiner toutes les causes possibles d’HTPA “et pas seulement les fenfluramines”: on a vu le résultat
  65. Contradiction parmi bien d’autres: l’ampleur de cette fenêtre chronologique renvoie à une période où, notamment avec des vaccins comme l’antitétanique, il n’était pas usuel d’injecter en intramusculaire: de telle sorte qu’on a, en sus de tout, oublié le préalable du pseudo-changement de voie d’administration pourtant présenté par le GERMMAD (cf. ci-dessus) comme un facteur déterminant dans l’apparition de la myosfasciite.
  66. Tomljenovic L, Shaw CA. Aluminum vaccine adjuvants: are they safe? Curr Med Chem. 2011;18(17):2630-7. J’ai eu l’occasion d’exprimer directement aux auteurs mes réserves les plus expresses sur leur adhésion regrettablement peu critique au concept de myofasciite – apparemment sans succès…
  67. À ce prix, la Mémé qui boit une demi-coupe de champagne à chaque Nouvel An encourt les mêmes risques que le type qui descend trois bouteilles de vodka par jour… Le même type d’objection peut être adressé à un document moins académique, mais de grande notoriété chez les antivaccinalistes, à savoir la compilation de J. Pilette, disponible sur Internet.
  68. “Plus de 1700 références scientifiques!” écrit avec ferveur et point d’exclamation un site antivaccinaliste à propos de la revue du Dr Pilette… C’est l’evidence-based medicine revue et corrigée par l’idéologie du hit-parade…
  69. Ça impressionne beaucoup les professeurs de SVT, apparemment: la critique anti-vaccinale gagnera beaucoup le jour où ces derniers comprendront ce qu’on leur a déjà expliqué apparemment en vain, à savoir que l’épistémologie de la recherche clinique n’a rien à voir avec la leur – et que, de toute façon, si la formation en “sciences naturelles” représentait un barrage efficace contre les abus de la déculturation médicalisante, alors les manuels de SVT ne seraient pas actuellement le cheval de Troie d’une “forteresse” scolaire désormais assez ouverte aux “rumeurs du dehors” (J. Zay) pour que les prédateurs de la santé s’en donnent à coeur joie…
  70. Les agences de communication au service de Big Pharma le savent bien, qui expliquent avec des mines gourmandes que le lancement réussi d’un médicament passe par l’invention d’une “Belle Histoire” justement fondée sur des mécanismes supposés. Il un peu regrettable de voir des gens qui se posent comme critiques du système user exactement de la même rhétorique.
  71. Rev Neuro 2003; 159: 162-4. Cet enthousiasme d’extrapolation est également celui de Tomljenovic et Shaw qui n’hésitent pas, non plus, à évoquer la guerre du Golfe, la sclérose en plaques, la sclérose latérale amyotrophique, l’Alzheimer, le Parkinson, l’autisme et l’épilepsie – excusez du peu.
  72. Il est cliniquement et épidémiologiquement évident qu’aucune de ces deux entités ne saurait relever d’une seule étiologie – et c’est bien d’ailleurs une des raisons de leur flou persistant (même remarque concernant l’autisme).
  73. Rappelons, par comparaison, que les autorités sanitaires ont retiré Myolastan à la suite de deux cas de Lyell rapportés en quelque 50 ans chez des centaines de millions de patients…
  74. Dont la principale vient de s’engager dans un ardent plaidoyer médiatique en faveur d’un des principaux responsables de toutes ces manipulations…
  75. Frappés au point, parfois, de porter un diagnostic de pithiatisme* chez les malheureux malades concernés.
  76. Dont j’ai parfaitement compétence, cette fois, pour dire qu’elles existent et qu’elles sont effroyablement fréquentes.
  77. Comme on ne sait pas si tous les sujets ayant reçu un vaccin aluminique présentent ce tatouage, et qu’on ne connaît non plus la durée de sa persistance, il est également très probable qu’une proportion de ces patients n’auront jamais aucune biopsie “positive” selon les critères du GERMMAD.
  78. J’ai posé un diagnostic d’hystérie chez l’une des premières patientes qui m’avait été adressée.
  79. Je crois savoir qu’en certaines instances d’indemnisation, on entretient – non sans raison – quelques doutes sur l’organicité des symptômes allégués par les plus quérulents des demandeurs…
  80. Il est patent, par exemple, que parmi tous ces médecins transformés en promoteurs hystériques du vaccin contre la rougeole, de moins en moins sont à même d’en faire le diagnostic chez les personnes atteintes. Remarque similaire avec les méningites: la médiatisation récente d’évolutions atrocement catastrophiques renvoie moins un hypothétique renforcement de virulence méningococcique qu’à la tragique incapacité de nombreux médecins (urgentistes inclus) à évoquer le diagnostic et à le poser…
  81. On relèvera comme une illustration supplémentaire des problèmes actuels de la publication médicale que, malgré leur faiblesse pourtant criante, les résultats du GERMMAD aient été accueillis, apparemment sans difficulté, par une revue aussi prestigieuse que The Lancet
  82. À l’exception notable et courageuse de Thomas Papo.