“Ice bucket challenge”: l’art de noyer le poison…

Pesticides, herbicides, vaccins…

RÉSUMÉ – La presse internationale célèbre ces jours-ci le premier anniversaire de l’Ice bucket challenge, initiative qui, dans l’ordre de la débilité, laisse loin derrière elle le Téléthon et “Octobre rose” qu’on avait pourtant fini par croire invincibles. Il s’agit, rappelons-le, de se renverser un seau d’eau froide sur la tête “au profit” de la recherche sur la maladie de Charcot (ou sclérose latérale amyotrophique). Ainsi bruyamment relayées par les médias, les principales célébrités de l’époque s’appliquent de la sorte à détourner l’attention de pistes étiologiques très sérieuses, mais politiquement explosives, concernant cette terrible maladie: les pesticides/herbicides d’une part, certaines vaccinations d’autre part.


Jamais en retard d’une guerre dès qu’il s’agit de contribuer au décervelage contemporain, la presse1 célèbre ces jours-ci aujourd’hui le premier anniversaire de cette géniale idée appelée « Ice bucket challenge ».

On relèvera comme une coïncidence éventuellement providentielle que la célébration de cette innovation terminologique assez incongrue pour n’appeler aucun essai de traduction soit, à deux jours près, contemporaine d’une pétition concoctée par la section CGT de Carrefour protestant contre l’imbécilité consumériste qui consiste à envahir la communication commerciale de l’enseigne par des anglicismes douteux. Depuis plus de 10 ans, on savait que la publicité télévisée visait à acheter « du temps de cerveau disponible » ; on pressent aujourd’hui que contraindre les gens à ânonner des vocables auxquels ils ne comprennent rien doit contribuer à promouvoir l’obtusion intellectuelle.

On devrait donc s’inquiéter de voir la terrible maladie de Charcot s’inscrire désormais à l’entrecroisement de deux traditions aussi intellectuellement débilitantes l’une que l’autre :

  • abaisser le niveau critique des gens en amputant de leur « temps de cerveau disponible » celui qu’ils consacrent à mémoriser des vocables dont l’incompréhensibilité dissimule l’incongruité du contenu : la novlangue consumériste, c’est ça aussi ;
  • mobiliser l’émotivité des gens au détriment de leur respect humain, les conditionner à mettre leur esprit critique sous cloche en les incitant à s’approprier slogans imbéciles et gesticulations grotesques : le Téléthon et Octobre rose en sont de parfaites illustrations; faire allégeance à l’ordre du débile par des pantomimes qui permettent de faire l’économie des mots et des idées a toujours été un mode opératoire extrêmement efficace des sectes en tous genres.

En l’espèce, même ceux qui maîtrisent raisonnablement la langue anglaise auront beaucoup de mal à comprendre que l’ice bucket challenge renvoie à l’une des pathologies les plus cruelles de l’époque : la sclérose latérale amyotrophique (SLA, encore appelée maladie de Charcot), c’est-à-dire à une dégénérescence des neurones moteurs de la moelle épinière, du tronc cérébral et des voies cortico-spinales.

Cliniquement, la maladie se traduit surtout par une paralysie progressive des muscles de la respiration et de la déglutition, qui mène le plus souvent à un décès par asphyxie progressive2. Lancé à l’initiative des réseaux sociaux – dont on connaît l’intelligence créative –, l’ice bucket challenge consiste d’abord à se renverser un seau d’eau froide sur la tête, ensuite à donner de l’argent : ceux qui ne voient pas le rapport avec la maladie sont d’irrécupérables cons puisque des bienfaiteurs notoires de l’humanité s’y sont pliés, tels que Georges W. Bush, Bill Gates, Mark Zuckenberg, Oprah Winfrey3.

En fait, le « temps de cerveau disponible » avantageusement détourné grâce à cette initiative rigoureusement idiote permet d’éviter tout questionnement sérieux sur au moins deux pistes, chacune fort sérieuse et qui relèvent toutes deux de la santé publique :

  • la piste des pesticides/herbicides : il est curieux que la presse si prompte à s’emparer du sujet dès qu’il s’agit de pathologies aussi multifactorielles que l’Alzheimer ou le Parkinson s’obstine à ignorer les éléments clairs, précis, concordants permettant d’invoquer la responsabilité de ces produits dans la genèse de SLA – notamment professionnelles –, et qui ont formellement conduit la Cour d’Appel d’Orléans (Chambre des Affaires de Sécurité Sociale), dans un arrêt du 30/05/2007, à confirmer l’indemnisation des ayants-droit d’un agriculteur décédé de cette maladie4 ;
  • la piste des vaccinations, et notamment celle du vaccin contre l’hépatite B5.

À bon entendeur…

  1. Ouest-France, 20/07/15
  2. Outre cette issue terrible et bien qu’il s’agisse d’un désordre a priori moteur, la maladie s’avère souvent extrêmement douloureuse par les crampes musculaires qu’elle cause.
  3. Quoique naturellement portés vers la gesticulation, Irène Frachon et Gérard Bapt ne s’y sont pas encore pliés, mais c’est probablement parce qu’ils ont leurs propres moyens de bienfaisance. Quant à Madame Belkacem, elle a marqué un intérêt prometteur pour l’initiative qui, on le voit bien, permettrait de concilier l’apprentissage – toujours rébarbatif (surtout pour ceux, de plus en plus nombreux, qui sont déjà exilés dans leur langue maternelle) – de l’anglais avec l’impératif pédagogique désormais central du jeu.
  4. La Cour fondant cette décision déjà ancienne sur un rapport d’expertise « méticuleux et détaillé, témoignant d’un souci rigoureux d’objectivité » – mais qui, sur tout ce temps, n’a eu l’heur d’exciter ni les « lanceurs d’alerte », ni les habituels promoteurs d’iceux, ni les vaillants défenseurs de l’environnement…
  5. Sachant que, pour l’heure, les associations de victimes ont mieux à faire qu’attirer l’attention du public sur cette piste, occupées qu’elles sont à célébrer les « experts » de l’administration sanitaire qui ont tant contribué au plantage de toutes les études menées sur ce vaccin, incluant celles portant sur cette pathologie neurologique…